Quel protocole pour la conservation du lait maternel en crèche (et en accueil individuel) ?

Afin de limiter le risque microbien et préserver les bienfaits nutritionnels du lait maternel, un protocole de conservation précis doit être appliqué dans les structures d’accueil. Rappel des grandes règles à respecter en accueil collectif, mais aussi individuel, avec Odile Trouche, Infirmière puéricultrice, consultante en lactation IBCLC, formatrice et membre du REGAAL (Réseau Gardois de l'Allaitement).

Un protocole de conservation du lait maternel précisé dans le contrat
Même si c’est une pratique à encourager afin de permettre aux mères de poursuivre leur allaitement après la reprise du travail, « toutes les structures n’ont pas un protocole ou l’infrastructure permettant de donner le lait maternel. Ce n’est pas une obligation légale, c’est le choix de la crèche et de l’assistante maternelle, rappelle Odile Trouche, consultante en lactation IBCLC. Si le lait maternel est accepté, les modalités de traitement devront être notifiées dans le contrat d’accueil de la structure ou le contrat de travail de l’assistante maternelle ». De même un protocole, voire une convention à signer, sera remis aux parents pour spécifier les modalités de transport du lait, les contenants acceptés, les durées de conservation, etc.

Un point clé du protocole : un contenant adapté à la conservation du lait maternel
Le plus simple pour la structure d’accueil est un lait maternel stocké dans un biberon, avec tétine adaptée. Il existe des biberons en verre, en plastique (sans BPA), en inox, « mais l’idéal reste le verre. A la congélation, le lait maternel se solidifie et les nutriments se collent à la paroi. Le verre demeure le matériau le plus sain, car ne dégageant aucun substance toxique », rappelle Odile Trouche.

Quant aux sachets stériles spécial lait maternel, ils sont certes pratiques mais nécessitent différentes manipulations : ouverture du sachet, transvasement du lait dans le biberon, etc. « Or, chaque manipulation du lait maternel multiplie le risque microbien, c’est pourquoi certaines structures refusent ces sachets », souligne la consultante en lactation. A noter cependant que certaines marques proposent des sachets s’adaptant directement sur le tirelait, puis le biberon. « Avec un seul contenant pour toutes les étapes, on limite le nombre de manipulations, c’est une solution très intéressante dont il faut parler aux parents. »

Biberon ou sachet, le personnel de crèche ou l’assistante maternelle doivent vérifier que chaque contenant est étiqueté avec les mentions suivantes :
  • le nom et prénom de l’enfant,
  • la quantité de lait en ml,
  • la date et l’heure du recueil,
  • la date et l’heure de congélation s’il s’agit de lait maternel congelé,
  • la date et l’heure de décongélation le cas échéant.
Une astuce à donner aux parents : utiliser un code couleur différent selon qu’il s’agisse de lait frais, de lait congelé ou de lait décongelé.

Respecter la chaine du froid et créer un sas de sécurité
Du domicile au lieu d’accueil, le lait maternel doit être transporté dans une glacière ou un sac isotherme, avec des pains de glace. « On vérifie qu’ils sont bien propres », ajoute Odile Trouche. Le lait maternel frais ou décongelé sera, dès l’arrivée, mis au réfrigérateur, à 4°C – jamais dans la porte du réfrigérateur, moins froide. S’il s’agit de lait encore congelé destiné à servir de stock, il sera entreposé au congélateur à -18°C.

Le conseil de la consultante en lactation : mettre les biberons ou sachets dans une boite en plastique fermée dans le réfrigérateur à la maison, que l’on transvase ensuite dans la glacière puis, à la crèche ou chez l’assistante maternelle, dans le réfrigérateur. « Ainsi, les biberons ne sont pas en contact avec l’environnement du réfrigérateur, ni à la maison, ni dans la structure d’accueil. Cela crée un sas de sécurité anti-microbien supplémentaire ». Un point intéressant à aborder avec les parents donc.

Enfin, le réfrigérateur doit être nettoyé toutes les semaines chez l’assistante maternelle, et en crèche décontaminé selon le protocole sanitaire de la structure, et sa température régulièrement contrôlée (tous les jours dans les crèches).

Durées de conservation du lait maternel : une question importante du protocole !
Concernant les durées de conservation du lait maternel, il existe différentes normes. « Les normes hospitalières sont plus strictes comparées à celles de l’OMS et de la Leche League valables pour la maison, et également validées par des études cliniques. Simplement, l’environnement et le risque microbien est différent entre l’hôpital et la maison », explique Odile Trouche.

Schématiquement, les normes hospitalières appliquent le 4/4/4 :
  • 4 heures à température ambiante pour le lait maternel frais 
  • 4 jours au réfrigérateur pour un lait frais
  • 4 mois au congélateur pour un lait congelé
Celle de l’OMS et de la Leche League, le 8/8/8 :
  • 8 heures à température ambiante pour le lait maternel frais 
  • 8 jours au réfrigérateur pour un lait frais
  • 8 mois au congélateur pour un lait congelé
Un lait décongelé peut quant à lui se garder 24 heures au réfrigérateur, et 2 heures à température ambiante. Il ne doit pas être recongelé, ni mélangé à du lait frais. Attention : ces durées ne sont pas cumulables. Elles sont valables pour des bébés en bonne santé, nés à terme, et pour un lait recueilli en respectant toutes les précautions d’hygiène : lavage des mains, matériel propre, etc.

A la crèche et à l’assistante maternelle d’appliquer leur propre consensus, en fonction de l’environnement (taille de la biberonnerie par exemple), du niveau de formation du personnel, etc. Certaines crèches choisiront d’adopter la règle des 4/4/4 de l’hôpital. Parfois, des règles plus strictes sont appliquées, par exemple une durée de conservation de 48 heures seulement au réfrigérateur pour un lait frais. Dans tous les cas, ces durées sont à indiquer dans le contrat.

A la crèche, comme chez l'assistante maternelle : un réchauffage et une décongélation en douceur

« Le lait contient des éléments vivants et des agents anti-infectieux sensibles aux changements de température. Pour préserver ses bienfaits nutritionnels, il est important d’éviter les brusques écarts de température, que ce soit du chaud vers le froid lors de la congélation, ou du froid vers le chaud lors de la décongélation et du réchauffage », rappelle Odile Trouche. Par conséquent, jamais de micro-ondes, ni de bain marie à l’eau bouillante pour réchauffer le lait maternel. De même, on veillera à décongeler le lait maternel en douceur, en le mettant au réfrigérateur, puis à température ambiante avant de le donner eu bébé. « S’il ne le prend pas à température ambiante, on le réchauffe quelques minutes dans de l’eau chaude à 40°C maximum ». Même chose pour le lait frais si le bébé le préfère tiède (36°C).

Un lait maternel, qu’il soit frais ou décongelé, doit impérativement être jeté dans les deux heures maximum dès lors qu’il est touché par la bouche du bébé. Aussi afin d’éviter le gâchis, « il est important de rappeler aux mamans de privilégier des petites quantités de lait maternel 15 à 60 ml en moyenne », recommande l’infirmière puéricultrice. Un bébé allaité n’a en effet pas le même rythme de remplissage et de vidange gastrique, il ne faut donc pas se calquer sur les quantités que boit un bébé au lait maternisé à tel ou tel mois. De plus, avec l’entrée à la crèche ou chez l’assistante maternelle, le nourrisson risque d’espacer ses repas afin de privilégier les tétées lorsqu’il est avec sa mère.

Lait à l’aspect caillé, lait maternel à jeter ?
Une fois décongelé, il arrive que le lait maternel prenne un aspect caillé et une odeur aigre. « Cela est dû à la forte présence de lipases, une substance qui aide à la digestion des triglycérides. Certaines mères ont un lait qui en contient un peu plus. Malgré cette consistance et cette odeur, le lait reste tout à fait propre à la consommation. » Cependant, certains bébés peuvent le refuser. « L’astuce à donner aux mamans consiste, avant de congeler le lait maternel, de monter le lait à 50°C dans de l’eau chaude, afin de désactiver ces lipases. », recommande Odile Trouche.

Ne pas oublier l’allaitement in situ
« L’allaitement in situ doit aussi être encouragé. Durant la première année du bébé, les mères bénéficient, en vertu du Code du travail, d’une heure non rémunérée, scindable en deux, pour tirer leur lait ou venir allaiter leur bébé sur le lieu d’accueil. », rappelle Odile Trouche. Mais souvent, elles n’osent pas demander. « Les crèches et assistantes maternelles ont un rôle à jouer en proposant aux mamans de venir allaiter le bébé, et en mettant à leur disposition un espace dédié », conclut la consultante en lactation.

A noter enfin que le personnel de crèche et les assistantes maternelles peuvent bénéficier de formation, d’un accompagnement professionnel, de réunions d’information thématiques sur l’accueil du bébé allaité. Ne pas hésiter à se renseigner.
Article rédigé par : Julie Martory
Publié le 03 mars 2016
Mis à jour le 16 novembre 2022
Bonjour, le lait frais peut être réchauffé 2 fois et peut être gardé jusqu'à 8 jours au réfrigérateur. Quand on ne connait pas le lait maternel on n'écrit pas un article dessus ! Comment peut on continuer un allaitement sereinement alors que vous invitez au gâchis, c'est déjà bien difficile de tirer cet or blanc.