Comment est né le courant pédagogique Reggio ?

Dans la ville italienne de Reggio Emilia, après la seconde guerre mondiale, les habitants traumatisés par la barbarie qui vient de les frapper de plein fouet, mènent une réflexion sur l’éducation comme lutte contre l’ignorance et l’autoritarisme. Toute la ville de Reggio s’engage dans un mouvement fort pour créer une pédagogie favorisant l’émergence des potentialités et compétences de l’enfant : créativité, autonomie, expression. L’enfant est considéré comme un citoyen à part entière ! Dans les années soixante, un enseignant, Loris Malaguzzi transforme cette expérience  locale en vrai courant pédagogique.
L’engagement de toute une ville
A Reggio Emilia, après seconde guerre mondiale, les habitants se mobilisent pour ne plus jamais revivre le fascisme. Leur constat : c’est le manque d’éducation positive qui a favorisé l’émergence du fascisme. Leur objectif : construire un autre avenir pour leurs enfants. Les habitants créent alors et autogèrent des lieux d’accueils pour tout-petits. Ce qui a aussi pour conséquence de favoriser et valoriser le travail des femmes.
C’est une initiative unique car c’est une des premières villes au monde où toutes les pratiques à destination du jeune enfant relèvent d’une même approche pédagogique co-construite par les habitants eux-mêmes. Toute une communauté choisit de s’impliquer dans l’éducation des enfants avec un ensemble de valeurs très fortes.

Un fondateur charismatique
Loris Malaguzzi est né en 1920. Enseignant (diplômes en pédagogie et psychologie), il s’est emparé dans les années 60 de cette expérience régionale pour créer « l’approche Reggio», un courant pédagogique à part entière. Il crée ainsi la première dynamique au monde où dans toute une ville l’ensemble des pratiques autour du jeune enfant s’inscrivent dans une cohérence éducative. Sa démarche fondatrice est d’inscrire toute une communauté dans l’éducation des enfants, de façon impliquée ! Son objectif était de créer une nouvelle façon de « faire de l’éducation ». Cette approche pédagogique est aussi appelée les « 100 langages de l’enfant », en référence à un très beau texte de Loris Malaguzzi  :
« LES CENT LANGAGES DE L’ENFANT
l’enfant est constituée d’une centaine.
L’enfant dispose d’une centaine de langues
de cent mains
d’une centaine de pensées
d’une centaine de façons de penser
de jouer et de parler
toujours à cent pour cent
façons d’écouter
de s’émerveiller à l’amour
cent joies
pour le chant et la compréhension
une centaine de mondes
à découvrir
une centaine de mondes
à inventer
une centaine de mondes
à rêver.
L’enfant a une centaine de langues
(Et une centaine de centaines de centaines d’autres)
(...) »

Ce texte met en avant un des point forts de la pédagogie développée à Reggio : l’importance de favoriser les multiples expressions de l’enfant.

A Reggio Emilia,  tout continue
Aujourd’hui, la ville représente environ 173 000 habitants dont 4500 enfants. Les 28 crèches de la ville appliquent l’approche Reggio : toutes les familles demandeuses d’une place en crèche y sont acceptées. Et le pourcentage de familles demandant une place en accueil collectif est beaucoup plus important que dans le reste de l’Italie.
Les taux d’encadrement des jeunes enfants sont assez similaires avec la France, mais chaque professionnel de la petite enfance travaillant dans une crèche ou une école Reggio est formé préalablement à cette approche spécifique et bénéficie sur son temps de travail de 6 heures réservées à la formation continue, recherches, rencontres, projets, partenariat.
En 1994 le centre international "Reggio children" a été créé. C’est un lieu de recherche et de formation visant à faire rayonner l’approche Reggio et de façon plus large des méthodes d’éducation promouvant les capacités de l’enfant.
La recherche se fait au quotidien avec les enfants et non dans des universités, grâce à la documentation des éducateurs et enseignants.
Depuis 2008 une exposition créée à et sur Reggio fait le tour du monde : « The Wonder of learning, the hundred languages of children ».
Article rédigé par : Elise Mareuil, « enfance et parentalité », formatrice et conseils petite enfance
Publié le 12 septembre 2016
Mis à jour le 12 juin 2023