Les Kimochis, ces peluches qui aident les enfants à mieux vivre leurs émotions

Loin d’être de simples jouets, les Kimochis sont de véritables outils d’intelligence émotionnelle pouvant apaiser bien des tensions. Il est possible de se former à leur utilisation pour ensuite proposer des ateliers sous forme de petits groupes. Cela peut commencer dès 2 ans , c’est pourquoi certaines crèches commencent à utiliser ces peluches pas comme les autres.
 « Key.mo.chee » signifie « sentiment, émotion » en japonais. Mais les Kimochis sont nés dans l’imagination d’une Américaine, Nina Rappaport Rowan. Bouleversée par les actes de violence qui se produisent régulièrement dans les écoles de son pays, cette ancienne productrice de dessins animés cherche à créer un outil ludique et pédagogique permettant, dès le plus jeune âge, d’exprimer ses émotions de façon appropriée et d’entrer en relation avec les autres. La méthode Kimochis voit ainsi le jour en 2008. Depuis quelques années, elle est accessible en Europe aux professionnels de la petite enfance via les formations proposées par sa représentante officielle, Charlotte Uvira .

Des séances en trois temps
« J’ai commencé la formation Kimochis à l’automne 2017. Dans ma pratique, je ressentais le besoin d’un outil avec lequel les enfants puissent travailler concrètement sur leurs émotions », explique Eva Srouji, éducatrice  de jeunes enfants et directrice de la micro crèche Les Hiboux (Gorze). « Les livres sur ce thème sont très bien mais je voulais aller plus loin. Là, nous sommes davantage dans la dimension du jeu de rôle. J’anime un atelier de 15-20 minutes tous les 15 jours, avec 4 à 6 enfants. Les plus jeunes ont 20 mois. Il faut qu’ils puissent commencer à s’exprimer verbalement car l’objectif est d’interagir. »

Chaque séance se déroule suivant le même déroulé. Dans un premier temps, le petit groupe accueille le Kimochi qui a été choisi par l’adulte. S’il s’agit de Bug la chenille, il est probable qu’elle se cache un peu au début et qu’elle ait du mal à dire bonjour aux enfants car elle est timide et qu’elle n’aime pas trop les changements. Mais c’est aussi le plus réfléchi et prudent des Kimochis. S’il s’agit de Huggtopus la pieuvre, elle va au contraire se montrer très expansive et affectueuse au moment des présentations ! Mais attention, il lui arrive parfois d’être un peu « fofolle » et d’étouffer les autres par ses démonstrations. Chacun des 5 principaux Kimochis (Cat, Lovey Dove, Cloud, Bug, Huggtopus) utilisés en ateliers a en effet sa personnalité bien à lui. Ainsi, chaque enfant peut s’y identifier.

Dans un deuxième temps, l’adulte raconte l’histoire du Kimochi et décrit quelles émotions l’agitent aujourd’hui. Ces émotions sont représentées par des petites balles en peluche placées dans le ventre/poche du Kimochi. L’une représente la joie, l’autre la colère, l’autre la tristesse… Cette mise en situation permet aux enfants d’apprendre à mettre des mots sur leurs propres émotions, en les verbalisant, en les mimant, en les jouant…

Enfin, dans un troisième temps, tout le petit groupe est invité à trouver ensemble des solutions pour aider le Kimochi à exprimer ses besoins de façon adéquate et à se sentir plus à l’aise avec ce qu’il ressent.

Le Kimochi favorise l’empathie
« On est vraiment dans la co-construction », apprécie Eva Soujri. « Le Kimochi aide l’enfant à se connaître mais aussi à connaître l’autre puisqu’il est amené à aider le petit personnage. » Ainsi, même les plus petits peuvent commencer à se familiariser avec la notion d’empathie. C’est ce qui a séduit Bérangère Collins, psychologue à Bruxelles, qui les utilise elle aussi. « Cette méthode permet à l’enfant de ne pas se centrer uniquement sur ses émotions mais de prendre aussi en compte celles des personnes qui l’entourent. Il apprend progressivement comment exprimer ses besoins mais aussi comment accueillir ceux des autres. Le Kimochi aide aussi à sortir d’une échelle verticale de la relation enfant-adulte, où l’un peut être amené à prendre l’ascendant sur l’autre, pour aller vers une échelle horizontale, où tout le monde peut faire entendre et respecter ses besoins. C’est ce que vise l’éducation positive.»

Mais pourquoi avoir adopté les Kimochis, alors que Bérangère Collins travaillait déjà beaucoup avec des peluches au sein de son cabinet ? « Chaque personnage a un tempérament bien à lui. Cela les rend attachants, on va leur pardonner tout malgré leurs forces et leurs faiblesses. Passer par le personnage Kimochi fait que l’enfant va pouvoir utiliser le personnage comme tierce personne lorsqu’il va s’exercer et donc se sentir en sécurité avant d’essayer de se lancer lui-même. »

Une continuité à la maison
Autre avantage de la méthode, chaque séance faite en structure d’accueil ou en atelier est complétée par des explications à destination des parents qui peuvent ainsi prolonger le travail fait autour du Kimochi par des petits exercices faciles à mettre en place au quotidien (Family Fun). « Il m’est déjà arrivé qu’une maman me rapporte qu’un soir où elle était énervée et en colère, son petit garçon lui a expliqué ce qu’on pouvait essayer de faire quand on se sentait comme Cloud, le Kimochi à qui il arrive de crier », se félicite Eva Srouji. 
 
Article rédigé par : Aurélia Dubuc
Publié le 21 mars 2019
Mis à jour le 26 juin 2019