La grippe : elle concerne aussi les tout-petits

La grippe est une des maladies les plus courantes pendant la saison hivernale. Longtemps considérée comme une maladie qui atteint surtout les grands enfants, les adolescents et les adultes, elle touche cependant également les tout-petits, bien que le diagnostic soit plus difficile à poser chez eux. On fait un point complet sur cette maladie avec le Dr Stéphanie Barratin, médecin généraliste qui a longtemps travaillé en PMI et intervient aujourd’hui dans les crèches du réseau Cap Enfants.
« Il faut d’abord distinguer le syndrome grippal de la grippe », rappelle le Dr Barratin. Le syndrome grippal est un ensemble de symptômes pouvant faire penser à la grippe mais qui peuvent correspondre à d’autres virus : c’est le motif de la consultation. La grippe est une pathologie à part entière issue d’un germe particulier : c’est le diagnostic.

Différents types de virus
La grippe est liée à des virus influenzae de la famille des Orthomyxoviridae. Il en existe trois types différents : le A, le B et le C. Le C est le plus souvent bénin et ne provoque pas d’épidémie, il est surtout responsable de rhumes. Le A et le B sont plus graves et ce sont eux qui causent les épidémies annuelles saisonnières. Dans le virus de type A, on distingue des sous-types, par exemple le virus H1N1. Il existe également plusieurs sortes de virus de type B, on parle alors de lignages.

Une maladie très contagieuse
Très contagieuse, la grippe se transmet par voie aérienne par les projections de salive, les éternuements, les sécrétions. Sur la durée, l’enfant est plus contagieux que l’adulte : il reste contagieux environ une semaine, pour 5 jours seulement chez l’adulte. L’épidémie de grippe saisonnière peut commencer dès le mois d’octobre et s’étendre jusqu’au mois de mars, mais elle démarre le plus souvent en janvier et dure 10 à 12 semaines.

Une combinaison de symptômes non spécifiques
Chez les enfants de plus de 5 ans, les manifestations de la grippe ressemblent à celles de l’adulte. Concernant les jeunes enfants, dans la plupart des cas les nourrissons (de 0 à 1 an) ne présentent pas beaucoup de signes quand ils font une grippe. Ils ont souvent un peu de fièvre, la gorge rouge (comme une sorte de pharyngite) et ne toussent pas beaucoup. Le diagnostic est donc très difficile à poser.
Chez les plus grands, on constate souvent une fièvre élevée qui apparaît brutalement et une association de signes respiratoires, digestifs et neurologiques : maux de ventre, nausées, diarrhées, selles molles, fatigue, toux (qui peut faire penser à une bronchite ou bronchiolite). « Ces symptômes ne sont pas spécifiques de la maladie, souligne le médecin, mais leur combinaison fait suspecter une grippe ».

Des risques de complications chez les plus fragiles
Les complications de la grippe sont rares chez le nourrisson et l’enfant et arrivent surtout chez les jeunes enfants fragilisés ou ayant des pathologies préexistantes. Les principales complications sont de type respiratoire, par exemple quand la grippe descend dans les poumons et provoque une pneumonie grippale (cas très rare). Sinon, elles sont liées aux conséquences des symptômes : une fièvre élevée peut entraîner la déshydratation de l’enfant et provoquer des convulsions.
Certains petits peuvent aussi subir « la décompensation d’une maladie préexistante », autrement dit quand la grippe aggrave transitoirement une maladie stabilisée. Par exemple si un enfant asthmatique attrape la grippe, son asthme peut être accentué.
Enfin le système immunitaire étant affaibli en cas de grippe, les enfants peuvent contracter une surinfection bactérienne, c’est-à-dire une maladie qui se greffe sur une autre maladie. Les jeunes enfants touchés par la grippe font ainsi souvent des otites. « Elles représentent environ un tiers des complications de la grippe chez les enfants en crèche », précise le Dr Barratin.

Un diagnostic pas toujours simple
« Pendant des années, on a considéré que les enfants n’avaient que des syndromes grippaux, car c’est plutôt à partir de 5 ans qu’on peut faire un diagnostic clinique sûr, explique le médecin. Mais les jeunes enfants sont aussi sujets à la grippe, ils peuvent la contracter à deux mois, six mois, deux ans… » Ils ont même plus de risques de l’attraper et de la transmettre que leurs aînés. Pour poser un diagnostic définitif, il faut faire un prélèvement. Mais on évite d’en faire chez les jeunes enfants et ceux qui en bénéficient sont généralement les enfants qui ont été amenés directement aux urgences pour une consultation ou les plus fragilisés.

Soigner en traitant les symptômes
Pour soigner la grippe, il faut en soulager et traiter les symptômes. Contre la fièvre et la douleur, on utilise un traitement antipyrétique classique, le Paracétamol. L’aspirine est à proscrire en cas de grippe. Et bien sûr faire des lavages de nez, donner des sirops pour la toux… Il existe en France un traitement anti-viral spécifique pour les enfants fragilisés : le Tamiflu (molécule oseltamivir). Pour rappel, un traitement antibiotique n’a aucun intérêt pour la grippe, sauf en cas de complication bactérienne.
« Il faut privilégier des vêtements légers (pour l’intérieur), conseille le Dr Barratin, réhydrater les enfants en les faisant boire suffisamment et leur assurer du repos. »
En général, les enfants mettent une semaine à guérir de la grippe, mais ils peuvent rester fatigués et avoir de la toux pendant encore trois semaines - un mois.

Prévention : appliquer les mesures barrières
Pour éviter la propagation de la grippe, il faut adopter les « mesures barrières » conseillées dans tous les cas de virus : se laver les mains au savon (on proscrit l’utilisation du gel hydroalcoolique pour les enfants), nettoyer les objets, les jouets, le linge utilisé, les tables de change, se couvrir la bouche quand on tousse, éviter de trop se frotter le visage… Les professionnels de crèche peuvent aussi utiliser les tableaux d’affichage pour prévenir qu’il y a des cas de grippe ou rappeler comment la soigner, et sensibiliser les parents tout au long de l’année.

Officiellement, le Ministère des Solidarités et de la Santé ne prévoit pas d’éviction systématique de la collectivité en cas de grippe, mais recommande aux familles de ne pas y emmener l’enfant pendant la phase aigue de la maladie. « En pratique, on s’adapte en fonction de l’état de l’enfant, c’est cela qui conditionne sa présence sur le lieu d’accueil ou non, indique le médecin. Il faut lui éviter le risque d’attraper une surinfection et de transmettre la grippe aux autres enfants. »

La vaccination recommandée
Le vaccin contre la grippe n’est pas obligatoire mais très fortement recommandé, notamment pour les populations à risque - jeunes enfants et personnes âgées - et les personnes potentiellement exposées comme les professionnels de santé, et même les femmes enceintes. Il est remboursé à 100% par la Sécurité Sociale en cas de pathologie sous-jacente, mais il est également possible de faire une demande spéciale de prise en charge totale pour les personnes ne contractant pas de pathologie sous-jacente.

Le vaccin est à refaire chaque année car les anticorps ne restent dans l’organisme que pendant 9 à 10 mois, et sa composition change d’une année à l’autre. Il comporte toujours deux souches de virus A et une de virus B, mais les sous-types et les lignages choisis dépendent de ceux qui seront potentiellement les plus présents pendant l’année. « Par exemple, explique le Dr Barratin, c’est le sous-type H3N2 du virus A qui était prédominant dans l’épidémie de grippe de l’année dernière, alors que cette année, c’est le H1N1 qui se propage le plus. »
Article rédigé par : Armelle Bérard Bergery
Publié le 09 janvier 2018
Mis à jour le 19 février 2019