Quatre pistes pour prévenir le CMV en collectivité

Très contagieux, sans traitement, extrêmement répandu dans les structures d'accueil collectives... Le CMV, ou cytomégalovirus, peut être un véritable casse-tête sanitaire pour les pros de la petite enfance qui n'ont finalement qu'une solution : la prévention. En la matière, la politique mise en place par la Direction des Familles et de la Petite Enfance de la Ville de Paris fait office de référence. Retour sur ces 4 axes principaux avec le Docteur Adeline Fénières, médecin de PMI à la Ville de Paris.
1. Lutter contre toutes les épidémies et prévenir, in extenso, le CMV
Entre 20 et 60 % des enfants accueillis en crèche et âgés de moins d'un an sont excréteurs du cytomégalovirus (1)... Les chiffres officiels parlent d'eux-mêmes : le CMV représente, dans les structures d'accueil collectives, un véritable enjeu de santé publique. Face à ce constat, la Direction des Familles et de la Petite Enfance de la Ville de Paris s'est naturellement saisi du dossier il y a maintenant plusieurs années. En effet, « depuis la création de la Protection Maternelle Infantile à Paris, les établissements d’accueil municipaux bénéficient de la présence des médecins de PMI. Nous avons ainsi une grande culture de la prévention. Il était donc normal de mettre en place des procédures d'hygiène très protocolisées, notamment en cas d'épidémie, dès le début des années 2000 », explique le Dr. Adeline Fénières. Le mot d'ordre des services de la Ville : parer à l'urgence en période épidémique puis pérenniser ces bonnes pratiques pour protéger enfants et professionnels des infections courantes au quotidien. Ainsi, tous les protocoles spécifiques mis en place dans les crèches lors de la crise de la grippe AH1N1 (relatifs notamment à l'hygiène des mains des agents, au changement des poubelles, au traitement des déchets) sont aujourd'hui encore d'actualité pour prévenir d'autres maladies, à l'instar du CMV.

2. Eviter la contamination de personne à personne
Sur le terrain, cette prévention au long cours se concrétise en premier lieu par une série de mesures visant à limiter la contamination interpersonnelle. Toujours basés sur les recommandations officielles (du Haut Conseil de la Santé Publique, de l'Etat, ou d'autres sociétés savantes), les protocoles en la matière sont nombreux. Un exemple simple (mais parlant) : le lavage des mains. « Les consignes relatives au lavage des mains sont affichées dans tous les établissements d'accueil. La méthode, la durée, les produits à utiliser : tout est explicité et toutes les crèches disposent aujourd'hui des produits nécessaires pour compléter le lavage par une friction de gel hydroalcoolique, » souligne la spécialiste. Et de citer aussi les efforts réalisés autour de l'hygiène des professionnels municipaux : « l'hygiène individuelle est également très importante, qu'elle soit vestimentaire ou corporelle. Il est ainsi demandé aux agents de ne pas avoir les ongles longs ou manucurés, de réaliser des brossages des mains et des ongles réguliers dans la journée, de ne pas porter de bagues ou de bracelets, etc. ». Sans oublier toutes les mesures visant à limiter les contacts avec les fluides corporels des enfants...

3. Limiter la contamination environnementale et la propagation du CMV
Deuxième axe fort de prévention : enrayer au possible, la contamination environnementale. Et là encore, il n'y a pas, dans les structures parisiennes, de place laissée au hasard. « Si elle se faisait de manière informelle avant, l''hygiène des locaux et des jouets est formalisée dans nos établissements depuis 2000, » souligne le Dr. Fénières avant de rappeler quelques mesures suivies à la lettre dans chaque établissement. « Tous les points de contacts et les surfaces lavables où évoluent les enfants, comme les poignées de porte, les tables, les chaises, doivent être systématiquement nettoyées avec des produits qui ont eux-mêmes fait l'objet d'un protocole et dont l'usage varie en fonction du risque épidémique et des besoins du moment. [...] L'hygiène du linge est également très encadré : un tissu contaminé par un fluide corporel doit  être lavé par la lingère à température suffisante pour tuer les bactéries, soit 55 °C ou plus. Et le même linge passe ensuite à la machine séchante pour compléter le traitement,» rappelle-t-elle. Quant aux jouets utilisés dans la journée, « ils doivent être laissés à tremper dans un produit nettoyant-désinfectant après le départ des enfants. Pour faciliter ce nettoyage, d'autres jouets leur sont proposés le lendemain, » explique le médecin de PMI. Autant de bons réflexes qui permettent de limiter la prolifération du CMV entre autres maladies infectieuses.

4. Porter une attention toute particulière aux agents enceintes  
Dernière priorité de la Ville de Paris : les professionnelles enceintes, première population à risque en cas d'exposition au CMV (voir à ce titre notre article Le CMV décrypté). Dans les établissements d’accueil parisiens, dont les effectifs sont essentiellement féminins, une double politique a été mise en place (2). Au moment de l'embauche et lors des visites de médecine du travail, les agents sont informées sur la prévention des maladies infectieuses et les risques liés au CMV en cas de grossesse. Puis, une fois la grossesse déclarée, ces dernières ont la possibilité de demander un changement de section. « Celui-ci peut être une première solution pour une femme enceinte, qu’elle soit  séropositive ou non pour le CMV. En travaillant avec les enfants plus âgés, elle limite les contacts avec les fluides corporels et les maladies transmises par ce biais, et donc le risque d’infection ou de réinfection par le virus,» souligne le Dr Fénières. Enfin, plus rarement, une réaffectation auprès d’enfants de plus de 3 ans, par exemple dans l'un des jardins d'enfants de la Ville peut également être demandée.


(1)    Source : Guide de la survenue de maladies infectieuses dans une collectivité du Haut Conseil de la Santé Publique
(2)    Politique basée notamment sur l'avis du Conseil Supérieur d'Hygiène Publique de France du 8 mars 2002 relatif aux recommandations pour la prévention de l'infection à cytomégalovirus chez les femmes enceintes :


 
Article rédigé par : Eléonore Schreibman
Publié le 30 mai 2016
Mis à jour le 27 novembre 2017