Etude : trop de médicaments prescrits aux moins de 6 ans

Peu de choses ont changé entre 2010-2011 et 2018-2019 concernant la prévalence des prescriptions pédiatriques ambulatoires (POP) en France. Une étude française publiée dans la revue The Lancet Regional Health Europe tire la sonnette d’alarme sur le nombre trop important de médicaments prescrits aux enfants et plus particulièrement aux nourrissons et aux enfants de moins de 6 ans.

Trop d’antalgiques et d’antibiotiques prescrits
En 2018-2019, plus de 85% des enfants de moins de 18 ans ont reçu une prescription de médicaments contre 82,5% en 2010-2011. En tête, les antalgiques (64,3%) suivis des antibiotiques (40,5%), des corticoïdes nasaux (32,8%), des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) (24,4%), des antihistaminiques (24,6%) et des corticoïdes systémiques (21%). 

Surprescription chez les nourrissons et les enfants de moins de 6 semaines 
La prévalence des POP chez les nouveau-nés et les nourrissons de moins de 6 semaines est passée de 42,9% à 58,8% de 2010-2011 à 2018-2019. Chez les nouveau-nés et les nourrissons âgés de moins de 6 semaines, ce sont les prescriptions de la vitamine D (40,4%) qui arrivaient en tête. Les enfants de moins de 6 ans étaient notamment plus exposés aux corticostéroïdes inhalés, aux agents antibactériens non pénicillines bêta-lactamines et aux corticostéroïdes systémiques que les plus âgés. 

Les enfants français, 20 fois plus susceptibles que les petits norvégiens de recevoir des corticoïdes 
Et chez les moins de 6 ans, ce ratio a été multiplié par 33 par rapport aux pairs norvégiens. Or, précisent les auteurs de l’étude « les corticoïdes systémiques sont responsables d'effets indésirables graves bien connus  comme un risque accru d'infections ». Concernant les corticoïdes nasaux la prévalence en France était de 27,3%, alors que celle de sa principale indication, la rhinite allergique, varie de 3,8% à 8% dans la population pédiatrique en Europe occidentale. 

Des prescriptions mal adaptées 
Et alors que les corticoïdes nasaux ne sont pas étiquetés pour les nouveau-nés, il y a eu une augmentation de 59 % chez cette classe d’âge vulnérable. La prévalence des POP pour les inhibiteurs de la pompe à proton (IPP) - principalement pour traiter le reflux gastro-œsophagien - était également très élevée en France et a augmenté de 42 % pour l'ensemble de la population pédiatrique et de 382 % pour les nouveau-nés et les nourrissons de ≤6 semaines alors même que des alertes sur les risques avaient été lancées et que leur efficacité pour les symptômes de reflux n'est pas démontrée chez les nourrissons. Même constat pour la prescription de métopimazine, contre les vomissements, sa prescription a augmenté de 84 % au cours des 10 ans malgré les effets secondaires neurologiques et cardiologiques potentiels.

Un impact significatif des recommandations 
Certaines améliorations concernant la surprescription de POP ont été observées sur la période de 10 ans. C’est le cas pour les antibiotiques. Les recommandations françaises ayant permis de diminuer de 33 % les taux de prescription d'antibiotiques pour 1000 habitants pédiatriques/an avec point positif moins de renouvellement des prescriptions dans l’année. « Cependant, les enfants français étaient encore 5,3 fois plus susceptibles que les enfants néerlandais de recevoir des antibiotiques »,  comme le souligne l’étude qui précise aussi que « les antibiotiques sont encore principalement prescrits pour les infections virales et contribuent fortement à l'augmentation de la résistance aux antibiotiques ». 
En conclusion, les chercheurs indiquent que les résultats de l’étude « devraient inciter à des campagnes d'orientation clinique et/ou à des décisions réglementaires telles que l'arrêt du remboursement des médicaments ou des incitations à optimiser les pratiques ». La cible prioritaire étant, compte tenu des effets secondaires indésirables et de leur surprescription en pédiatrie, les corticoïdes, les IPP, les antiémétiques et les antibiotiques.

Source : Sciencedirect.com
Article rédigé par : Isabelle Hallot
Publié le 13 juillet 2021
Mis à jour le 29 octobre 2021