Etude : une veilleuse allumée pourrait perturber le sommeil des tout-petits

Une étude menée par des chercheurs de l’université du Colorado à Boulder suggère que les enfants d’âge préscolaire (3-5 ans) sont très sensibles à la lumière dans l’heure précédent le coucher. Même de faible intensité celle-ci fait chuter le taux de mélatonine et est susceptible de perturber le sommeil des enfants, longtemps après son extinction.

La lumière, synchroniseur majeur de notre horloge interne
La lumière est le principal synchronisateur temporel du corps, influençant les rythmes circadiens, c’est-à-dire le fonctionnement de notre horloge interne sur un rythme de 24 heures soit la régulation du sommeil, de la fatigue, de l’appétit tout comme celle de la température corporelle sur une journée. Quand le rayon de lumière arrive sur la rétine, un signal est transmis au niveau du cerveau, plus particulièrement au noyau suprachiasmatique qui coordonne les rythmes dans tout le corps, y compris la production nocturne de mélatonine. Si cette exposition lumineuse se produit le soir alors que la mélatonine augmente naturellement, elle peut la ralentir ou l'arrêter, retardant la capacité du corps à passer à passer « en mode nuit ». 

Les yeux de enfants plus sensibles à la lumière
Les yeux des enfants ont des particularités : ils ont une pupille plus grande et un cristallin plus transparent que celui les adultes ce qui fait que la lumière y pénètre plus facilement. Une étude récente avait montré que la transmission de la lumière bleue à travers l'œil d'un enfant de 9 ans est 1,2 fois plus élevée que celle d'un adulte. Cette sensibilité accrue à la lumière peut les rendre encore plus sensibles au dérèglement du sommeil et du système circadien.

Les enfants placés comme dans une "grotte"
Pour quantifier cette sensibilité, les chercheurs se sont associés à une mathématicienne de la Colorado School of Mines. 36 enfants en bonne santé, âgés de 3 à 5 ans ont été choisis pour participer à l’étude, durant 9 jours. Ils portaient un capteur au poignet qui suivait leur sommeil et l’exposition à la lumière. Pendant sept jours, les parents ont gardé les enfants sur un horaire de sommeil stable pour normaliser leurs horloges biologiques et les installer dans un schéma dans lequel leurs niveaux de mélatonine augmentaient à peu près à la même heure chaque soir. 

Le huitième jour, les chercheurs ont transformé la maison des enfants en "grotte" : du plastique noir a été posé sur les fenêtres et les lumières ont été tamisées. Ils ont prélevé des échantillons de salive toutes les demi-heures du début de l'après-midi jusqu'après l'heure du coucher permettant ainsi d’avoir des valeurs du début naturel de la nuit biologique des enfants et de leurs niveaux de mélatonine.

Le neuvième jour, les jeunes enfants ont été invités à jouer à des jeux sur une table lumineuse dans l'heure précédant le coucher. L'intensité lumineuse variait d'un enfant à l'autre, allant de 5 lux à 5 000 lux. (Un lux correspondant à la lumière produite par une bougie à 1 mètre de distance).

En comparaison avec la nuit précédente, la mélatonine a baissé de 70% à 99% après une exposition à la lumière. Étonnamment, les chercheurs ont trouvé peu ou pas de relation entre l’intensité lumineuse et la chute de baisse de mélatonine, hormone clé du sommeil. C’est d’ailleurs une différence avec l’adulte. 

En réponse à une lumière mesurée entre 5 et 40 lux, soit beaucoup plus faible que la lumière ambiante typique, la mélatonine a chuté en moyenne de 78 %. 

Plus surprenant, 50 minutes après l'extinction de la lumière, la mélatonine n'a pas rebondi chez plus de la moitié des enfants testés.
Ces résultats semblent indiquer que chez les plus jeunes, une exposition même faible à la lumière le soir, provoque une chute importante de la mélatonine ce qui peut potentiellement perturber le sommeil.

Des conseils aux parents
Les chercheurs n’encouragent pas forcement à mettre les enfants dans le noir absolu mais d’éteindre les écrans – une tablette proche des yeux envoie quasiment 100 lux– et de garder la lumière au minimum pour favoriser de bonnes habitudes de sommeil chez leurs enfants et plus encore chez les enfants ayant des difficultés de sommeil. 

Lire l'étude "High sensitivity of melatonin suppression response to evening light in preschool-aged children"
Article rédigé par : Isabelle Hallot
Publié le 08 février 2022
Mis à jour le 13 janvier 2023