Assistante maternelle : accueillir une fratrie, un casse-tête administratif !

Si l'accueil d'une fratrie peut s'avérer particulièrement épanouissant au quotidien, il peut être source, pour l'assistante maternelle, de démarches administratives et juridiques particulièrement complexes. Combien de contrats faut-il prévoir ? Qu'advient-il de l'ancienneté, de la période d'essai ou du préavis quand le petit frère ou la petite sœur vient rejoindre le groupe ? Le point en quelques questions récurrentes chez les professionnelles.
J'accueillerai à la rentrée Joseph (5 ans), sa sœur de 6 mois et Camille, 18 mois. Mes agréments sont prévus pour des enfants de moins de 6 ans. Que faire quand le plus grand fêtera son anniversaire ?
Que l'on accueille ou non une fratrie, les agréments sont octroyés par la PMI en fonction du nombre d'enfants présents simultanément au domicile de l'assistante maternelle et des conditions d’accueil. 
La loi ASAP de 2020 et ses applications réglementaires (1) ont supprimé la condition d’âge pour obtenir l’agrément. Dès lors si votre agrément stipule une condition d’âge et que vous souhaitez accueillir des enfants plus grands, il faudra le modifier en faisant la demande auprès de votre PMI, qui vérifiera que les autres conditions (sécurité, santé et épanouissement des enfants) si elles sont bien respectées (art L. 421-3 du Code de l’action sociale et familles). 

Le conseil de l'UFNAFAAM : si vous souhaitez modifier votre agrément, prévoyez cette demande bien en amont dudit anniversaire ! En effet, si cette évolution de l'agrément ne pose généralement pas problème, elle implique souvent l'organisation d'une visite de l'équipe de la PMI et un échange interrogatoire relatif à l'adaptation de vos pratiques notamment, celles qui peuvent poser de nouvelles problématiques posées par l'accueil (si vous devez désormais chercher l'enfant à la sortie de l'école, comment les déplacements sont-ils organisés avec les autres enfants, etc.). Le Conseil Départemental a alors 3 mois pour rendre sa décision, délai au terme duquel la modification de l'agrément est considérée comme acquise (1).

Si j'accueille la petite sœur d'Arthur, pour lequel nous avons établi un contrat il y a plus d'un an, dois-je réaliser un deuxième contrat de travail ?
La Convention collective nationale des particuliers employeurs et de l'emploi à domicile du 15 mars 2021, applicable au 1er janvier 2022, clarifie cette épineuse question. Dans son article 90.1, elle  précise en effet que “dès lors que l'assistant maternel et le particulier employeur sont déjà liés par un contrat de travail conclu pour l'accueil d'un enfant de la même famille et que ce contrat n'a pas été rompu, la règle suivante s'applique : les parties conviennent, dans le cadre du nouveau contrat, juridiquement distinct de toute autre relation contractuelle de travail, de reprendre l'ancienneté acquise par l'assistant maternel au titre du contrat le plus ancien, toujours en cours.”
Il faudra donc rédiger un contrat de travail par enfant, et cette mesure est applicable même pour les fratries. Vous pourrez trouver un modèle d’un tel contrat de travail à l’avenant 1 de la convention collective.

Remarque de l'UFNAFAAM : Même s’il s’agit d’un même employeur, il peut y avoir une période d’essai car il s’agit d’un nouvel enfant.

Si je garde un deuxième enfant d'une fratrie, qu'adviendra-t-il de mon ancienneté ?
L’article 90.1 de la nouvelle Convention Collective stipule que “ les parties conviennent, dans le cadre du nouveau contrat, juridiquement distinct de toute autre relation contractuelle de travail, de reprendre l'ancienneté acquise par l'assistant maternel au titre du contrat le plus ancien, toujours en cours.”
Dès lors, si le contrat du premier enfant est toujours en cours, votre ancienneté sera reportée sur le deuxième contrat. C'est donc la date d'embauche mentionnée sur le contrat du "grand" qui fait office de référence pour calculer notamment la durée du préavis ou encore les indemnités de rupture du contrat.

J'accueille Enzo depuis maintenant 18 mois et son petit frère, Léon, depuis 5 mois. Me sera-t-il possible de prendre mes 4 semaines de congés cette année, sachant que je n'aurai pas acquis autant de jours pour Léon ?
Toujours selon la nouvelle Convention Collective, si l’ancienneté est reprise avec le contrat de travail signé pour le second enfant de la fratrie, ce n’est pas le cas des droits relatifs aux congés payés. 
Les CP devront donc être définis dans le nouveau contrat de travail de manière distincte, comme pour tout autre enfant accueilli.

Je vais accueillir le petit frère d'une "grande" dont je m'occupe depuis maintenant 2 ans. Devrais-je avoir une nouvelle période d'essai ?
Cette fois, c’est l’article 95-1 du socle spécifique « assistant maternel » de la Convention Collective qui répond à cette question : “(…)Si le particulier employeur et l’assistant maternel sont liés par un contrat de travail en cours pour l’accueil d’un enfant, au titre duquel une période d’essai était prévue et a été concluante, la durée maximale de la période d’essai du nouveau contrat conclu pour l’accueil d’un autre enfant de la même famille est de 30 jours calendaires, pour s’aligner sur la durée maximale de la période d’adaptation de l’enfant.”

Le conseil de l'UFNAFAAM : Cette période d’essai ne peut pas excéder 30 jours, elle n’est pas obligatoire. Sachant qu’elle est parfaitement facultative (Art. 44-1) : les parents et l’assistant maternel peuvent tout à fait décider de ne pas la stipuler au contrat. 
S'il n'y a pas de période d'essai supplémentaire à prévoir, cela ne dispense pas la professionnelle d'organiser une période d'adaptation pour ce second petit. À prévoir donc, même si l'enfant connaît déjà le lieu d'accueil et l'assistante maternelle !

Si j'accueille deux enfants d'une même fratrie, vais-je avoir une ou deux feuille(s) de paie ?
La question des fiches de paie s'apparente elle aussi à un véritable casse-tête ! En effet, Pajemploi n'est habilité à émettre qu'une seule attestation de salaire par employeur regroupant tous les enfants de la fratrie et les heures d'accueil. Or, ce système peut s'avérer particulièrement problématique pour la professionnelle dans deux cas : 
  • Au moment de l'inscription à Pôle Emploi, la rupture du contrat pour les deux enfants issus de la fratrie (et donc le calcul des indemnités) peut être difficile à prouver, les attestations Pajemploi ne faisant figurer qu'un nom et non les deux prénoms des enfants accueillis. 
  • En cas de contrôle fiscal, une assistante maternelle ne disposant pas de feuilles de paie distinctes pour les deux enfants d'une même fratrie pourra difficilement prouver la conformité de son calcul de l'abattement fiscal (évalué en fonction du nombre d'enfants accueillis) à sa situation professionnelle usuelle, risquant ainsi le redressement.
Le conseil de l'UFNAFAAM : Afin de vous protéger notamment de tout litige fiscal, mieux vaut demander à votre employeur de vous fournir chaque mois, en plus de l'attestation Pajemploi, deux bulletins de salaire sur lesquels figurent clairement les noms et prénoms de chaque enfant. À cette fin, des modèles sont fournis et disponibles sur les sites des organisations syndicales ou associations représentant la profession. Actualité de dernière minute : apparemment Pajemploi nous a indiqué lors d’une réunion, qu’il était prévu que deux bulletins de salaire soient enfin mis en place lors d’un accueil d’une fratrie, pour autant nous n’avons pas eu de dates concrètes à ce niveau…

Je suis employée par deux familles dont une pour laquelle j'accueille deux enfants. Quel partage des frais (indemnités d'entretien, de déplacements) dois-je prévoir entre mes employeurs ?
Pour ce qui est des indemnités de déplacements, l'article 113 de la convention collective stipule que “Lorsque plusieurs particuliers employeurs sont demandeurs de déplacements, l’indemnité due par chacun d’entre eux est déterminée au prorata du nombre d’enfants transportés. Le nombre d’enfants transportés s’entend des enfants présents dans le véhicule, y compris les enfants de l’assistant maternel si le déplacement est effectué pour répondre à leurs besoins. Chaque particulier employeur est alors redevable, envers l’assistant maternel, de la quote-part de l’indemnité calculée pour son enfant.”
Donc, il s’agira de demander à chacun de vos employeurs la quote part correspondant au nombre d’enfants dans la voiture : s’il y a trois enfants dont deux frères, vous pourrez demander aux parents de ces derniers les ⅔ de l’indemnité, y compris pour votre enfant si un déplacement le concerne également.
Pour ce qui est des indemnités d’entretien, les sommes dues, visant à permettre à l'assistante maternelle de couvrir les frais énergétiques et en matériel liés à l'accueil, sont proportionnelles au nombre d'enfants accueillis. Dès lors, un parent qui confie deux enfants à la même professionnelle devra lui verser l'équivalent de deux fois l'indemnité journalière.


Sources :
(1) Décret du 14 décembre 2021 relatif « à la gouvernance des services aux familles et au métier d'assistant(e) maternel(le)
(2) Convention collective nationale des particuliers employeurs et de l'emploi à domicile du 15 mars 2021 résultant de la convergence des branches des assistants maternels et des salariés du particulier employeur (IDCC 3239)
Article rédigé par : Véronique Deiller avec Sandra Onyszko, responsable juridique et de la communication de l'UFNAFAAM et Nathalie Dioré, secrétaire fédérale de la CSAFAM
Publié le 21 mars 2018
Mis à jour le 21 mars 2018