Les micro crèches s’organisent

Il y a encore quelques mois les micro-crèches avaient le vent en poupe. Leur développement spectaculaire - une progression à trois chiffres - forçait le respect. On se félicitait de leur contribution à l’offre d’accueil. Aujourd’hui, elles semblent entre articles de presses et rapports officiels (1) être attaquées de toutes parts. Les gestionnaires de micro-crèches ont décidé de réagir et de s’organiser.
Plus 200% en 4 ans. Les chiffres sont vraiment impressionnants. Si les objectifs de la précédente COG (2013-2017) n’ont pas été atteints, l’explosion des micro crèches a permis de limiter les écarts. Sur 60 000 places créées, 30 000 l’ont été par les micro crèches.

Des reproches tous azimuts
Mais on leur reproche pêle-mêle de pousser comme des champignons et de s’implanter là où il n’y a pas forcément de besoins, de ne pas respecter la mixité sociale, d’être couteuses, très commerciales (un bon business en quelque sorte) et de ne pas toujours offrir un accueil de qualité. Des reproches qui irritent nombre de  gestionnaires et porteurs de projets qui ne se reconnaissant pas dans cette énumération. Des reproches qui les inquiètent alors même que se négocie la prochaine COG entre l’État et la Cnaf.
Attaquées et peu défendues, les micro crèches ont décidé de s’organiser car s’il est vrai que la puissante Fédération Française des Entreprises de Crèches (FFEC) a en son sein une commission micro crèches, son fonctionnement et discussions (peu nombreuses) ne conviennent pas à tous. D’une part les membres les plus influents de la FFEC (les 4 à 5  principaux réseaux) ne développent que peu ou pas de micro crèches et quand ils le font, ils ne rencontrent pas les mêmes difficultés que les « petits gestionnaires ». Plus isolés et moins aguerris, ceux-ci sont confrontés à des problématiques locales qui ne peuvent être défendues au niveau national. Les départements, les PMI et les Caf ne ménent pas tous les mêmes politiques à leur égard.
 
Des spécificités régionales
C’est pour ces raisons notamment qu’est née dans les Bouches du Rhône en avril dernier la Fédération des Entreprises des Micro Crèches (FEMIC). Son président Pierre Comboroure, gestionnaire des micro crèches UB4kids à Marseille et à ce titre adhérent de la FFEC explique : « Nous réunissons aujourd’hui 10 entreprises gestionnaires soit environ 30 micro crèches du département. L’idée était de sortir de notre isolement, de parler de nos expériences, de s’aider et de parvenir peut-être à mutualiser certains services ». Mais aussi de faire le tri entre gestionnaires sérieux et moins sérieux. Car ses membres défendent farouchement la qualité de l'accueil qu'ils proposent aux familles. Du coup les adhésions se font sur cooptation. Ils n’ont pas trouvé mieux car définir des critères objectifs, c’est compliqué. « Et ce n’est pas notre rôle précise- t-il nous ne sommes pas là pour faire la police. Aux services de PMI eux qui donnent les autorisations d’ouverture de faire le travail ». Derrière la nécessité de de se regrouper une dernière préoccupation : « Dans les grandes villes, il y a une recrudescence de projets et la concurrence est difficile. Elle mériterait d’être organisée. Je fais partie de ceux qui, trouverait utile qu’on vérifie que les nouvelles structures s’implantent là où il y a des besoins. En fait je ne trouverais pas illogique qu'il y ait une régulation géographique de la concurrence  et  nous serions prêts à y participer » conclut-il. Mais la FEMIC voudrait surtout que les porteurs de projets soient mieux accompagnés, que les gestionnaires de micro crèches soient reconnus comme de vrais interlocuteurs par les Caf, les PMI et les départements. « On en a assez d’être mis de côté, de n'être associés à rien » regrette Pierre Comboroure. Mais il est vrai que toutes les régions ne sont pas logées à la même enseigne.
En décembre la FEMIC - en tant qu’association - a décidé d’adhérer à la FFEC. Mieux vaut être dedans que dehors. Une façon de faire poids et de savoir ce qui se dit et se fait. Mais une façon aussi de signifier à la Fédération qu’une commission-alibi ne suffit pas. Que les membres de la FEMIC souhaitent faire entendre leurs voix et être mieux représentés.

Regroupement national autour de la FEMIC
Au début de l’année trois gestionnaires de micro crèches indépendantes (2), connues pour leur groupe Facebook fermé Gestionnaires de micro crèches , exaspérées par les attaques répétées contre les micro crèches et assez démunies face à ce climat d'hostilité ont organisé un colloque à Paris. En dehors de toute organisation officielle, mais avec un invité d’honneur la FEMIC. Les gestionnaires de 70 micro crèches et d’une vingtaine de projets ont répondu à leur invitation. Un succès qui montre bien leur désarroi et leur besoin de se serrer les coudes. A l’issue de la journée la plupart ont adhéré à la FEMIC qui avait décidé d'accueillir des adhésions-cooptations de micro crèches établies partout en France. Avec l'idée que plus nombreux ils seront, plus la FEMIC pésera dans la FFEC. Ce qui n’empêche pas Pierre Comboroure de persister dans sa conviction « qu’il faut aussi s’organiser au niveau local ».

La FFEC sur la défensive
Interrogée à la fin de l’année sur les micro crèches et les tensions qu’elles suscitent, la FFEC est restée, en cette période de négociation de la nouvelle COG, sur la défensive, se contentant de nous communiquer une déclaration de son conseil d’administration défendant les micro crèches comme étant « le moteur de la croissance des places en crèches » ce que personne ne conteste  et appelant « au maintien de tous les modes de garde dans leur diversité ». Ce que personne ne conteste non plus.



1) Observatoire National de la Petite Enfance ; Rapport de l’IGAS/IGF
Rapport de l’IGAS/IGF
2) Laurie Técher (Les Etoiles), Fanny Schosseler (Nursea) et Alycia Jankowski (Les P’tits Cailloux)
Article rédigé par : Catherine Lelièvre
Publié le 06 février 2018
Mis à jour le 12 février 2018