Crèches familiales : des assistantes maternelles créent un collectif

Il y a les assistantes maternelles à domicile, celles qui exercent en Mam… mais aussi celles qui travaillent dans les crèches familiales. Ce mode d’accueil qui, s’il est souvent cité dans les discussions sur le SPPE, est dans les faits en déclin. Pour faire entendre leur voix, mettre en lumière leurs difficultés et défendre ce mode d’accueil auquel elles sont très attachées, une dizaine d’assistantes maternelles en crèches familiales ont décidé de se constituer en collectif. Son nom : le Collectif National d’Assistants Maternels en Crèche Familiale (CNAMCF).
Des réseaux sociaux à la création d’un collectif
La genèse du CNAMCF débute sur les réseaux sociaux. Notamment avec la constitution du groupe Facebook « Nounous de crèche familiale : infos et partage du quotidien », il y a un an. « A travers nos échanges, on s’est rendu compte que les règles appliquées par les collectivités n’étaient pas les mêmes alors que le statut sur certains points est très clair », explique l’un des membres du collectif qui préfère rester anonyme. Décidées à ce que la réglementation soit mieux appliquée, à enrayer le déclin des crèches familiales, à améliorer les conditions de travail et être plus visibles, une dizaine d’assistantes maternelles sautent donc le pas en créant mi-janvier le CNAMCF. Pas d’association, mais un simple collectif pour réunir plus facilement et plus rapidement le plus de monde possible et éviter les formalités et les cotisations. Un collectif ouvert aux parents et à tous les professionnels de la petite enfance. 

Un mode d’accueil en déclin
Et pour se faire connaître, le CNAMCF a envoyé un courrier à une douzaine de syndicats et organisations. Un courrier dans lequel le tout nouveau collectif brosse un tableau sombre de la situation actuelle des crèches familiales. « Le service d’accueil familial est en net recul depuis de nombreuses années. Face aux départs en retraite et aux départs volontaires les crèches familiales peinent à recruter, les effectifs se réduisent telle une peau de chagrin. Le désintérêt et les difficultés financières amènent aussi les collectivités à se désengager de ce mode d’accueil qui propose pourtant une offre complémentaire aux autres modes d’accueil », écrit-il ainsi. Les crèches familiales n’ont donc pas le vent en poupe. A titre d’exemple, tout récemment encore, c’est le CCAS de Poitiers qui a décidé de mettre un terme à l’activité de la crèche familiale de la ville. Une des raisons avancées : un mode d’accueil qui n’est plus dans l’air du temps, avec chiffres à l’appui un taux d’occupation bien moindre qu’en crèche. Mais la cause ne résiderait-elle pas d’un manque de communication sur les crèches familiales, qui sont, il faut le dire, peu connues des familles (et pourtant appréciées par celles qui y recourent, considérant qu’elles sont un bon mixte entre accueil collectif et accueil individuel) ? Et, qui sont, rappelons-le, également non dénuées d’avantages du côté des assistantes maternelles (salaire versé par la crèche familiale, encadrement…).

La volonté de soutenir les syndicats
L’autre message délivré dans le courrier : le CNAMCF s’engage à prêter main forte aux syndicats. « Le collectif connaît le rôle primordial des syndicats. Il souhaite également par son action soutenir les syndicats prêts à défendre les droits des assistantes maternelles et l’intérêt des crèches familiales au sein des modes d’accueil du jeune enfant », indique-t-il.

1ère action du CNAMCF : l’envoi d’une lettre ouverte au ministre des Solidarités
Le CNAMCF n’a pas seulement écrit aux syndicats, il a également rédigé une lettre ouverte. Les destinataires ? Jean-Christophe Combe, ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées, Stanislas Guerini, ministre de la Transformation et de la Fonction Publique, Elisabeth Laithier, présidente du Comité de filière petite enfance, Jean-Benoît Dujol, DG de la DGCS et Cécile Raquin, DG de la Direction générale des Collectivités Locales. En date du 30 janvier, elle a pour objet : « Vers la fin des crèches familiales, véritable service public de la petite enfance. » Là ici aussi, il dresse un constat alarmant. Et rappelle un rapport de septembre 2018 du ministère des Solidarités et de la Santé qui mettait déjà en évidence le « déclin » de ce mode d’accueil et avançait des préconisations pour l’enrayer. « Aujourd’hui nous sommes en 2023, 6 ans après, rien n’a changé ! Tout a empiré ! », s’exclame le CNAMCF. 

Un collectif déjà force de proposition
Plein d’allant, le jeune collectif expose dans la lettre ouverte ses « solutions ». Il convient ainsi, selon lui, de « renouer de manière urgente avec l’attractivité de la profession, en demandant aux employeurs publics d’appliquer la réglementation existante et en améliorant les conditions de travail ». Et de lister très précisément :

• Création d’un référentiel juridique afin de clarifier le statut d’assistant maternel en crèche familiale.
« Aujourd’hui, il y a beaucoup de flous et d’interprétation, même les gestionnaires s’arrachent les cheveux », nous indique le collectif. Et poursuit : « la création de ce référentiel juridique fait aussi partie des recommandations du CESE dans son avis sur un Service public de la petite enfance ». Il estime en effet qu’il faudrait « relancer la mise en place de crèches familiales. » (préconisation 15)

• Des contrats de travail conformes à la réglementation (cf article D423-5 du casf).

• Une mensualisation sur 52 semaines conformément à l’article L3242-1 du code du travail.
« Actuellement, il y a encore des assistantes maternelles payées au forfait », s’insurge le CNAMCF. Et ajoute : « Certaines aussi ne sont pas mensualisées sur 52 semaines mais au contrat comme les indépendantes. »

• Stop à l’utilisation abusive de contrats à durée déterminée (cf directive européenne 1999/70/CE).
« Des collègues sont en CDD depuis des années alors qu’au niveau de la fonction publique c’est limité. Pourquoi n’applique-t-on pas les règles des agents contractuels ? Au final, ils font comme ça les arrange », juge le CNAMCF.

• Revalorisation des salaires et des indemnités d’entretien et de repas. Un salaire minimum horaire par enfant au moins égal à 0,333 fois le montant du SMIC.
Et le CNAMCF d’insister à ce sujet : « Une urgence quand on sait que certaines n’ont pas vu leur taux horaire augmenter depuis 2003 ! » Et d’ajouter : « En moyenne, le salaire net d’une indépendante est égal à notre brut. »

• Revalorisation des heures supplémentaires à l’identique de tout agent public (majoration de 25%).
• Une homogénéisation des droits avec ceux des agents contractuels.
A titre d’exemple, « certaines mairies accordent le compte épargne-temps et d’autres pas. On ne sait plus à quoi on a le droit », pointe du doigt le CNAMCF.

• Durée annuelle maximale de temps de travail de 2250h par employeur (cf article L423-22 du casf).
« Il y a un vrai problème d’interprétation concernant le temps de travail. Les 2250 heures, c’est par contrat ? par employeur ? Dans le texte, il est écrit que c’est par employeur mais des collectivités disent que c’est par contrat », dénonce le CNAMCF.

• Paiement par nos employeurs du complément employeur aux IJSS en cas d’arrêt dérogatoire covid conformément au décret n°2021-13 du 8 janvier 2021.

Ses prochaines missions
Communiquer, se faire connaître, valoriser la place des crèches familiales, fédérer… voilà ce à quoi va s’attacher le collectif dans les prochaines semaines. Puis, dans un second temps, il compte réaliser un état des lieux, à l’aide de sondages notamment, pour pouvoir faire remonter les difficultés. « Dans la lettre ouverte, on a mis des points forts, mais l’idée après c’est d’entrer plus dans le détail et de faire des propositions », explique le CNAMCF. Un programme chargé, mais le collectif est motivé et déterminé !

Pour contacter le collectif : cnamcf@outlook.fr
La page Facebook du CNAMCF

Cet article a été publié la première fois dans la Lettre Hebdo n°80
Article rédigé par : Caroline Feufeu
Publié le 06 février 2023
Mis à jour le 22 août 2023