Des députés se mobilisent pour les jardins d’enfants

Enfin les députés semblent se réveiller et venir au secours des jardins d’enfants dont la mort est programmée pour septembre 2024. Deux propositions de loi sont en cours et une délégation de la Fédération nationale des jardins d’enfants (FNDJE) vient d’être reçue par la conseillère solidarités de l’Élysée et Matignon alors même que les portes du Ministère de l’éducation nationale leur sont toujours fermées. Le point sur ces initiatives de la dernière chance.

 
On savait le Sénat, et notamment Max Brisson, sénateur LR des Pyrénées-Atlantiques, et le sénateur parisien PS Rémi Féraud, très engagé auprès des jardins d’enfants pour tenter de décrocher leur sauvegarde. Les députés de l’Assemblée nationale jusqu’alors s’étaient montrés plus discrets sur le sujet.  (Voir LH 71)
 
Une proposition de loi portée par des dépurés LR
Emportée par Philippe Juvin, député des Hauts-de-Seine, et une quinzaine de députés LR, la proposition de loi enregistrée à l’Assemblée nationale le 7 mars dernier vise « à annuler les dispositions qui menacent l’existencedes jardins d’enfants ». Dans l’exposé des motifs, leurs auteurs reviennent sur l’historique de ces structures, sur leurs atouts pour conclure que «   l’objet de la présente proposition de loi qui entend pérenniser le dispositif limité temporellement par les dispositions actuelles de l’article 18 de la loi n° 2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance. Ilest proposé d’accorder une dérogation permanente aux jardins d’enfants dans leur définition résultant des dispositions de cet article 18 soit des établissements d’accueil collectif qui reçoivent exclusivement des enfants âgés de plus de deux ans jusqu’à leur entrée en classe préparatoire du premier degré et qui étaient ouverts à la date de la rentrée scolaire 2019. ».
Le moratoire obtenu pour 5 ans prévu par l’article 18 devient définitif.
Et les auteurs  précisent que cette dérogation permanente ne va pas à l’encontre du projet de loi sur l’école de la confiance puisque « comme prévu dans la loi sur l’école de la confiance, les établissements concernés continueront à contribuer à répondre aux objectifs visés par l’instruction obligatoire et à la mettre en œuvre dans les conditions prévues par le code de l’éducation, notamment s’agissant du respect des normes minimales de connaissances requises et de l’accès au droit à l’éducation et
à être soumis au contrôle des services de l’État
. »
En résumé : 3 articles. Le premier visant à pérenniser les jardins d’enfants existants (gérés ou financés par une collectivité publique) au-delà de septembre 2024. L’article 2 envisage une entrée en vigueur au 1er août 2024. Le troisième gage financièrement la proposition comme la loi l’exige.
Cette proposition sera examinée par la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale.
 Une proposition de loi émanant du parti socialiste en cours de validation
La deuxième proposition de loi intitulée « proposition de loi visant à pérenniser les jardins d’enfants gérés par une collectivité publique ou bénéficiant majoritairement de financements publics » n'a pas été encore enregistrée par l’Assemblée nationale, sa recevabilité sera examinée  demain mercredi le 15 mars. Elle est présentée par la députée  de Seine-Saint-Denis Fatiha Keloua Hachi et des membres du groupe socialiste. Elle est très proche de la proposition LR. Dans l’exposé des motifs, elle s’appuie beaucoup sur les jardins d’enfants pédagogiques gérés par la Ville de Paris et propose une modification de l’article 18. Pour pérenniser au-delà de l’année scolaire 2023-2024 les jardins d’enfants gérés ou financés majoritairement (+de 50%) par une ou des collectivités publiques. Entrée en vigueur 2024-2025 et un dernier article pour gager financièrement la proposition de loi.
 
Il y a à urgence

Les deux propositions auraient tout intérêt à fusionner tant elles sont proches. Les jardins d’enfants peuvent être légitimement un sujet trans partisan. Reste maintenant à savoir quand elle pourra être inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale… Il y a urgence mais ce n’est pas gagné ! Car seuls le Gouvernement, la Présidente de l’Assemblée nationale ou le Secrétaire d’État chargé des relations avec le parlement peuvent choisir l’ordre du jour. On voit mal le gouvernement et la majorité présidentielle déjuger l’ex-ministre de l’Education et sa loi pour une école de la confiance… Les députés En marche de l’époque avaient été parmi les plus intransigeants sur la question. Et l'empreinte de Jean- Michel Blanquer est encore  très  forte au ministère de l’Éducation nationale.
 
L’Élysée prévenu et à l’écoute
Et si le salut des jardins d’enfants dont on ne louera jamais assez le travail était dans les mains de l’Élysée ? Aurélie Ira et Caroline David de la FNDJE ont été reçues par Sarah Sauneron, Conseillère solidarités, égalité femmes-hommes et lutte contre les discriminations du Président de la République et de la Première ministre. Une rencontre assez conviviale, où les deux directrices de jardins d’enfants ont pu parler de leurs structures et plus généralement de ce que représentent les jardins d’enfants et du rapport de l’IGAS dont la recommandation, pour épauler la transformation des jardins d’enfants comme le voulait la loi, n’a pas été suivie. Évidemment, aucune promesse n’a été faite.

Beaucoup d’écoute et de questions. Peu de commentaires et aucune promesse si ce n’est celle d’informer le conseiller éducation, jeunesse du cabinet de la Première ministre.
Rappelons que personne du ministère de l’Éducation nationale n’a donné une réponse favorable aux demandes de rendez-vous de la FNDJE. Mais le ministère a bien sûr reçu et donné satisfaction aux tenants de l’instruction à la maison. Deux poids, deux mesures en quelque sorte. Cherchez l’erreur…

NB . cet article est paru pour la première fois dans notre Lettre Hebdo 85 du 13 mars.
Article rédigé par : Catherine Lelièvre
Publié le 14 mars 2023
Mis à jour le 02 avril 2023