Réformes en petite enfance : les réserves de l’Uniopss

Face aux mesures envisagées pour la petite enfance dans le cadre de la réforme des modes d’accueil, de la Stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté, et des autres travaux du Gouvernement, l’Uniopss fait part de ses craintes sur leur mise en œuvre.

Ce jeudi 26 septembre, l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés non lucratifs sanitaires et sociaux (Uniopss) a tenu sa conférence de presse de « Rentrée sociale 2019-2020 », qui s’intitulait « Acte II du quinquennat : Derrière les réformes… quel choix de société ? ». L’occasion de faire le point et de donner son sentiment sur les réformes engagées par le Gouvernement pour ses différents chantiers.
Concernant l’enfance, Jérôme Voiturirer, directeur général de l’Uniopss, a souligné que l’année 2019 avait été riche et intéressante, que « le Gouvernement a pris à corps le débat ». Une mobilisation bienvenue à deux mois des 30 ans de la Convention internationale des droits de l’enfants (CIDE). Mais, comme pour les autres champs politiques, l’Uniopss s’inquiète du manque de moyens dédiés et de la cohérence d’ensemble qui doivent accompagner ce volontarisme politique.

La qualité des modes d’accueil en péril
Comme nous l’évoquions en juillet dernier, l’Uniopss a participé à la concertation relative à la révision du cadre normatif applicable aux modes d’accueil du jeune enfant - organisée par la Direction Générale de la Cohésion Sociale (DGCS) dans le cadre de l’article 50 de la loi ESSOC. L’association avait alors fait part de ses craintes, notamment sur la qualité des modes d’accueil. Rappelant que c’est à eux de s’adapter aux besoins de l’enfant pour favoriser son développement et non à l’enfant de s’inscrire dans les impératifs gestionnaires du mode d’accueil. Et que le cadre règlementaire actuel des micro-crèches doit être révisé, sous peine qu’une augmentation du nombre maximal de places d’accueil affaiblisse la qualité d’accueil des enfants.
Dans son ouvrage de rentrée 2019-2020, l’association détaille ses autres réserves.

Une diminution de la mixité sociale des modes d’accueil
L’Uniopss pointe du doigts deux problématiques. D’une part, les modalités de calcul actuelles du bonus mixité « ne se fondent pas sur le revenu moyen ou médian des familles des enfants accueillis au sein d’une structure, mais sur le nombre d’enfants accueillis vivant des familles ayant une de faibles, voire très faibles revenus ». D’autre part, le possible développement des micro-crèche PAJE « irait à l’encontre des tendances affichées par la Stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté, conduisant à une orientation des familles vers des modes d’accueil en fonction de leurs ressources. »

Le plan de formation des 600 000 professionnels de la petite enfance en question
Il a été évoqué la possibilité que cette formation prenne la forme de simples modules d’apprentissage en ligne. L’Uniopss rappelle « la nécessité que cette formation s’inscrive dans une démarche qualifiante et de véritable formation continue. Il faut que ce format numérique ne se substitue pas à la possibilité d’un accompagnement humain. » Citant le rapport du Défenseur des droits (« Dématérialisation et inégalités d’accès aux services publics »), elle souligne qu’il est nécessaire de « conserver toujours plusieurs modalités d’accès aux services publics ».
Consciente que ces réformes nécessitent de dégager des moyens financiers et humains, l’Uniopss a demandé à ce qu’une étude d’impact soit conduite et que des engagements soient pris « afin que ces coûts supplémentaires ne soient pas laissés à la seule charge des gestionnaires, des professionnel.le.s et des familles ».  

L’avancée des droits de l’enfant limitée à certains publics
Par ailleurs, l’association considère que l’année 2019 a certes fait avancer les droits de l’enfant avec des mesures phares : la nomination d’un secrétaire d’Etat à la protection de l’enfance (Adrien Taquet) et son Pacte pour l’enfance, l’adoption d’une proposition de loi interdisant les violences éducatives ordinaires, l’élaboration de deux plans interministériels de mobilisation, de prévention et de lutte contre la violence faite aux enfants, la participation accrue des enfants dans les grands débats nationaux… Mais précise qu’il y a un vrai risque de « sélection » en fonction de certains publics, à défaut par exemple des enfants étrangers. « Ce que nous prônons, explique Jérôme Voiturier, c’est que si on veut avoir une vraie politique de l’enfance, qui concerne l’enfant quel que soit son statut, son origine sa situation familiale … il faut qu’elle soit incluse dans une vraie politique d’ensemble. »


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Article rédigé par : A.B.B.
Publié le 26 septembre 2019
Mis à jour le 09 décembre 2019