Les sorties en crèche en 7 points-clés

La vie de la structure se déroule aussi en-dehors des murs ! Les sorties parfois proposées par les professionnelles permettent de partager d’autres temps de jeux, de découvertes avec les petits. Sont-elles difficiles à organiser ? A quoi faut-il penser en premier ? Comment inclure les parents ?... Petit tour d’horizon des points à connaître et pratiques à adopter pour aborder plus sereinement les sorties. En gardant à l’esprit que toutes les structures ont des moyens et des modes de fonctionnement différents.
1. Inclure la sortie au projet de la structure
« Une sortie doit toujours être en lien avec le projet de la structure, qu’elle représente la mise en œuvre du projet pédagogique lui-même ou un projet spécifique au sein du projet éducatif global », rappelle Julie Marty-Pichon, ancienne directrice de crèche dans le Tarn et l'Ariège, co-présidente de la Fédération Nationale des Educateurs de jeunes enfants (FNEJE). Il y a donc à l’origine de toute sortie un projet pensé en amont. Dans le cas contraire, c’est prendre le risque de ne pas atteindre les objectifs fixés et les professionnelles comme les enfants peuvent en revenir déçus ou frustrés. « Même si bien sûr, dit-elle, il y a de chaque expérience des enseignements à tirer. »

2. Un travail d’équipe
L’organisation d’une sortie dépend de chaque type de structure, selon son fonctionnement et sa taille. Selon Julie Marty-Pichon, « en général plus l’équipe est petite, plus il facile de penser collectivement les sorties. » Dans les grosses structures, elles sont plutôt prises en charge par les EJE qui ont la responsabilité des missions pédagogiques. Et les directrices sont les « chevilles ouvrières » sur la partie organisationnelle et technique. « Mais chaque projet peut émaner de n’importe quelle professionnelle ! » précise-t-elle. Quand elle-même était directrice, le projet de sortie était pensé en équipe, puis une personne était désignée référente, autonome sur la mise en œuvre. « Laisser une certaine liberté d’action aux professionnelles de terrain permet de les valoriser, surtout quand elles s’investissent sur des projets qui leur tiennent à cœur et font sens pour elles. »

3. Bien informer les parents, quel que soit leur rôle
Dans les structures où la place du parent est prépondérante - crèches parentales, crèches associatives locales ou autre -, les parents sont intégrés à la réflexion sur le projet, parfois dès sa conception.
Dans les autres structures, ce sont les professionnelles qui impulsent le projet mais elles doivent veiller à informer les parents suffisamment en avance pour leur faire signer les autorisations ou s’ils doivent poser un jour de congé pour accompagner les enfants. La réunion de rentrée est une première occasion d’évoquer des projets de sortie durant l’année : par exemple, la sortie hebdomadaire ou tous les 15 jours à la bibliothèque, la grosse sortie de fin d’année. Puis au cours de l’année, divers moyens de prévenir les parents de la sortie à venir : à l’oral lors des transmissions, sur le tableau d’affichage, dans les cahiers de liaison s’il y en a…

Doivent-ils toujours seconder les professionnelles ? Ici aussi, tout dépend de la structure. « Dans les haltes-garderies où les enfants viennent de façon partielle, on peut choisir de ne pas faire appel aux parents, explique Julie Marty-Pichon. Justement pour proposer aux petits un temps hors de la maison et de la famille, où il se retrouvent avec les autres enfants de la structure notamment ceux qu’ils ne voient jamais. A l’inverse en crèche collective où ils sont parfois accueillis 40 à 50 heures par semaine, solliciter les parents pour accompagner la sortie est une bonne façon de recréer du lien avec leurs enfants et les professionnelles. »

4. Spécifier la place de chacun
En termes d’autorité, si la responsable de la structure n’est pas présente lors de la sortie, elle délègue un pouvoir de direction sur les professionnelles accompagnatrices. Et le rôle des parents pendant doit être bien spécifié : « Ils sont considérés comme des bénévoles faisant partie intégrante de l’équipe, et donc soumis à l’autorité de la professionnelle responsable, précise Géraldine Chapurlat, juriste spécialiste des modes d’accueil de la petite enfance. C’est très important de le rappeler pour baliser les choses et éviter que certains parents ne décident de faire cavaliers seuls. » Dans l’idéal, l’équipe rédigera un paragraphe spécifique sur les conditions de réalisation de la sortie, notamment sur la place des parents, dans le règlement de fonctionnement de la structure. Ainsi les dispositions s’appliqueront de la même manière à tous les parents et en cas de désaccord, chacun peut se référer au texte.

En termes de responsabilité, faisant partie du temps d'accueil, les sorties sont censées être couvertes par la responsabilité civile de la structure. Mais, dit la juriste, « il faut vérifier les conditions générales du contrat souscrit qui doit englober les agissements des bénévoles, comme l'impose la réglementation. »

5. Prévoir au minimum deux professionnelles dont une diplômée
Les exigences en termes de personnel sont les mêmes pour les sorties que pour le temps passé au sein de la structure - ni plus ni moins. « Les équipes pensent encore trop souvent qu’il est difficile d’organiser des sorties car il faut respecter la règle d’un adulte pour deux enfants… Mais cette recommandation n’existe pas dans la législation ! » insiste Julie Marty-Pichon. Tout comme une journée à la crèche, une sortie nécessite la présence de deux professionnelles minimum, en suivant la proportion d’1 un adulte pour 5 enfants qui ne marchent pas, 1 pour 8 enfants qui marchent. Même si bien sûr, plus grand sera le nombre d’accompagnateurs, plus aisé sera l’encadrement.

Ce qui peut éventuellement poser problème dans le cas des petites structures, c’est l’absence ou la présence d’une professionnelle diplômée pendant la sortie. En effet, le Code de la Santé Publique* spécifie la présence obligatoire d’une professionnelle diplômée dans les structures de plus de 21 berceaux. Or dans les crèches accueillant une vingtaine ou une trentaine d'enfants , il n’y en a parfois qu’une seule - les autres professionnelles étant elles qualifiées. « Dans ces cas-là, l’équipe prend soit le risque de ne pas compter de professionnelle diplômée parmi les accompagnateurs de la sortie, soit de laisser la structure sans professionnelle qui corresponde à la réglementation d’encadrement », souligne Géraldine Chapurlat.

6. Tous les modes de transports possibles
Si la sortie nécessite de prendre les transports en commun ou un car affrété, l’assurance de la structure doit être prévenue. Dans le cas où elle a lieu non loin de la structure, elle représente une bonne occasion de promenade avec les enfants. Là encore, à chaque équipe ses préférences : plutôt écharpes de portage, porte-bébés, ou poussettes pour les petits qui ne marchent pas. Poussettes doubles, triples… certaines vont même jusqu’à 6 places ! Privilégier les équipements robustes et spécialement conçus pour les collectivités.

Avec les enfants qui marchent, les professionnelles peuvent utiliser un lien de promenade, acheté ou fabriqué. « Les petits prennent vite l’habitude et en général, ils adorent ! » témoigne Julie Marty-Pichon. Mais de rappeler que même sans, les enfants restent souvent d’eux-mêmes sur le trottoir car naturellement, ils n’ont pas envie de prendre le risque de traverser tout seuls. Il est important selon elle d’habituer les enfants à sortir dans la rue et prendre le temps de leur expliquer comment être prudents. « C’est aussi une manière de leur apprendre à ne pas avoir peur du monde extérieur, » observe-t-elle.

7. L’après : penser à évaluer la sortie
La sortie ne s’arrête pas une fois le groupe rentré au sein de la structure, il s’agit ensuite pour les professionnelles d’en établir le bilan. « L’étape de l’évaluation est souvent oubliée par les équipes, » remarque Julie Marty-Pichon. Or elle finit de donner sens à la sortie en s’interrogeant sur différents points : la sortie a-t-elle intéressé les enfants ? Les objectifs fixés ont-ils été atteints ? A quels aléas les professionnels ont-ils été confrontés et comment y ont-ils fait face ? C’est grâce à ces réponses que l’équipe peut décider si elle reconduira l’expérience ou non. « On peut aussi discuter avec les plus grands, les enfants de 2 à 3 ans, propose-t-elle, pour leur demander directement comment ils ont vécu la sortie, ce qu’ils ont aimé, moins aimé… comprendre les émotions qu’elle a générées. »

Une bonne organisation de l’équipe permet donc d’organiser des sorties pendant l’année, sans limites de nombre. C’est en tout cas le message de Julie Marty-Pichon, aujourd’hui chargée de mission petite enfance en Occitanie. « On se met encore beaucoup de freins, mais en réalité tout est possible ! Le Rapport Giampino allait d’ailleurs en ce sens, en expliquant qu’il fallait passer du risque 0 au risque mesuré. Et c’est aux directions de le montrer à leurs équipes. »


** Article R2324-43 du Code de la Santé Publique
Article rédigé par : Armelle Bérard Bergery
Publié le 15 juin 2018
Mis à jour le 03 juin 2021