Mes premiers pas de directrice…ou les joies du management. Par Anne-Cécile George
Infirmière-Puéricultrice, directrice de crèche
La prise en charge des enfants était à l’opposé de celle proposée en milieu hospitalier puisqu’il s’agissait d’enfants sains. Plus aucun acte technique. Un sevrage brutal qui ne dura guère longtemps, tant les différents aspects pédagogiques du métier étaient passionnants. Aussi, j’appris le sens du mot « management ». Terme anglo-saxon, à l’origine de bon nombre de nuits blanches, d’ulcères gastriques et autres tracas intestinaux. En tant que directrice adjointe, j’eus encore la possibilité de me cacher derrière l’autorité du chef d’établissement. « Non, je pense que la directrice ne sera pas d’accord ». Ce n’était pas moi qui disais non, je n’étais pas le dragon. Juste le gardien du temple qui filtrait les demandes : « on ne pourrait pas installer un fauteuil de massage dans la salle de pause ? » ou encore « et si on fermait la crèche à 18H00 les vendredis ? », comme celles-ci donc. En soi, ça ne m’aurait pas déplu. Mais il faut être réaliste, et surtout savoir dire non. Alors souvent je me mets à penser : « enfant/équipe : même combat ».
J’ai appris sur le tas la façon d’aborder les problématiques. Comme un enfant qui fait ses propres expériences. Car je dois l’avouer, j’étais novice en matière de psychologie de l’adulte. Alors quand une professionnelle houspilla une petite fille de 18 mois sur son incapacité à patienter pour le repas, je ne pus m’empêcher de sur-réagir. Sur le moment. Devant l’enfant. Une heure de débriefe plus tard, avec une professionnelle en pleurs ayant eu la sensation d’être humiliée, je comprenais. J’écrivais alors ma devise « Dire les choses, oui. A chaud, non ».
Et surtout, je me répétais intérieurement « on n’est pas là pour être aimé,… on n’est pas là pour être aimé… ». Oui, enfin si on peut travailler dans une bonne ambiance, c’est mieux.
Quand je suis passée à 28 ans sur un poste de directrice, je n’étais plus un filtre, je devais prendre des décisions. En vrai. J’avais bien l’aide de la directrice adjointe pour m’aiguiller, m’épauler. Mais si la décision finale n’était pas la bonne, c’était bibi qui prenais une cartouche. En général, on comprend assez vite.
Quand on débute en tant que directeur de structure ET qu’on a moins de trente ans (oserais-je dire « quand on est jeune »), le premier réflexe de survie est de vouloir se faire respecter. Asseoir son autorité. Faire des exemples. Avec le recul, j’ai parfois été dure. Plus les années passent et plus je mise sur une forme de management « win/win ». Pas de perdant, quand tout le monde y met du sien. Et surtout recentrer l’équipe sur une cible commune : la prise en charge de l’enfant et sa famille avec l’instauration de groupes de travail qui permettent de se remettre perpétuellement en question, de s’échapper de son quotidien parfois usant, de se retrouver avec ses collègues autrement qu’à quatre pattes. Des groupes qui favorisent la cohésion d’équipe.
Et puis les erreurs de débutant, ce n’est pas que la première année de direction. On apprend, toute sa vie. Les caractères varient, les équipes changent de visage.
Je me suis documentée sur la psychologie de l’adulte, les méthodes de management. Je me suis formée. J’ai fait des tests, j’ai échoué. J’ai fait d’autres tests, qui ont marché. Une passion pour la petite enfance et tout ce qui gravite autour est née. J’ai appris tellement de choses depuis que je travaille en crèche que je ne regrette absolument rien. Même pas les nuits blanches. Peut-être.
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