Chrono crèche. Par Arnaud Deroo

Consultant en éducation, thérapeute et psychanalyste, auteur

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bébés jouent à la crèche
« On y arrive, on y arrive, doucement mais sûrement » me dit une directrice de crèche, très remontée contre Mme la Caf qui lui demande lors d'une rencontre pourquoi elle n'accueille pas les enfants 30 minutes, et pourquoi les enfants ne peuvent pas venir de 11h à 12h. Elle n'en peut plus d'entendre cela et avec une petite pointe d'agacement réagit : « Est-ce une demande faite aux écoles ? »
Et non, bien sûr car l'école est une histoire sérieuse, ce n'est pas de la garde ! Nous en sommes encore là aujourd’hui, dans cet état d'esprit.

Céline (appelons-la ainsi !) a la moutarde qui lui monte encore plus au nez quand Mme la Caf lui dit qu'elle n'a fait que 69% de remplissage (et oui les enfants remplissent pour Mme la caf) et donc qu'elle ne recevra pas la totalité de la fameuse PSU, alors qu'elle accueille des enfants porteurs de handicap et que la prise en charge demande parfois une présence plus soutenue et soutenante. Cette fameuse PSU que le nouveau responsable Caf considère comme « une bonne idée », même si, dit-il, quelques aménagements doivent se faire (mais lesquels, on ne sait pas ...). Même Monsieur « Délégation Pauvreté » semble trouver que cette prestation est une bonne chose.

Ah, oui, cela aussi me fait sourire, les crèches comme espace d'intégration, de mixité, de lutte contre les inégalités, la pauvreté, en intégrant des programmes type « Parler Bambin ». Je rêve ! Je connais plein de crèches, dans des quartiers populaires comme on dit, où justement tout le travail des équipes consiste à amener les parents, les enfants dans le lieu crèche et où la PSU est difficilement atteignable puisque les parents qui ne travaillent pas, ne voient pas toujours pourquoi mettre un enfant en crèche (en effet) mais la Caf râle, la mairie râle car le taux de remplissage n'est pas atteint !
On tombe sur la tête…et on va demander aux crèches de faire « du Parler Bambin » mais non, l'urgence n'est pas là.

Il semblerait qu'une EJE travaille avec ce Monsieur pauvreté. Connait-elle le sujet de la pauvreté ? Je m'interroge. J'aimerais que ce Monsieur m'explique aussi comment dans un quartier populaire où la seule crèche est une micro-crèche privée, un parent avec le RSA, une  famille pauvre peuvent inscrire leur enfant. Impossible financièrement ! Alors où est donc l'intégration, la mixité sociale ? Il y a quelque chose qui ne tourne plus rond !

Ah ! Encore un truc, Mme la Caf, expliquez-moi comment la situation suivante peut être possible : une micro-crèche dépose un projet, elle reçoit une subvention d’investissement à hauteur de 80% de la Caf et un an après dépôt de bilan… Où sont passés les 80% ? Envolés, disparus !

Mais tout va bien, dormez tranquille, regardez Hanouna, Ardisson, cela vous aidera à ne pas trop penser.
Article rédigé par : Arnaud Deroo
Publié le 03 avril 2018
Mis à jour le 03 avril 2018
Portrait de LaDo
le 09/04/2018 à 22h12

Bonjour Mr Deroo, pourriez-vous nuancer vos propos concernant les micros crèches ? Beaucoup de professionnels, ou non, lisent vos chroniques, et le manque de perspective concernant certains points abordés dans vos articles donne une vision très, voire trop binaire du sujet. Dommage car vous ne manquez pas d'arguments. Vous devriez donc prendre en compte plus de paramètres avant de tirer à boulets de canon sur certains lieux d'accueil.