Dessine-moi un parent. Par Arnaud Deroo

Consultant en éducation, thérapeute et psychanalyste, auteur

dessin - coloriage de parents
Quel honneur, le ministère a choisi le titre de mon premier ouvrage et le titre de mes ateliers parents que j'anime depuis plus de 25 ans pour présenter les lignes directrices de leur projet parentalité.
Des collègues, des amis m'appellent depuis la sortie de ce document pour savoir si j'ai contribué à l'élaboration de ce projet puisque le titre est « dessine-moi un parent ». Que nenni que nenni !
J'ai donc lu ledit document, j'ai été voir dans les annexes en me disant : « je dois être dans les références, dans la bibliographie, puisqu’ils ont choisi mon titre et qu’ils ont oublié de me demander mon accord » (ça se fait d’ordinaire). Même pas ! Déjà dans une précédente chronique, je disais « rendre à césar ce qui appartient à césar » et si le ministère s'y met aussi, où allons-nous mon brave monsieur.

J'espère chers lecteurs que vous comprenez qu'il n'y a rien ici de nombrilisme ou d'une fierté personnelle mais plutôt un pied de nez à ces bureaucrates qui me font bien rire et sourire, et ça me permet d'introduire ma réflexion sur le sujet parentalité tellement à la mode. Dans cet écrit, des choses intéressantes mais pas non plus des choses exceptionnelles... Tout est centré sur l'accompagnement éducatif : groupe de parents, groupe parents-enfants. Vous me direz c'est normal, pour autant je trouve que cela aurait été souhaitable, voire judicieux d'introduire que la parentalité se travaillent aussi avec l'accès au logement et au travail

Ce n'est pas parce des parents vont participer à des ateliers parents que la relation à l'enfant ira mieux. Si cette même famille de trois enfants habite dans un « deux chambres » et que l'un des parents est au chômage, la parentalité risque d'être fragilisée et ils auront beau venir et venir à des ateliers, rien ou peu de choses changeront. Il ne faut pas être dupe. Ensuite ça sera bien sûr de la faute des travailleurs sociaux si rien ne change… alors que le problème de base n'est pas résolu. Il faut bien trouver un coupable.
Attention de ne pas tomber dans le panneau, maintenant faire de la parentalité, animer des groupes de parents, des groupes de parents-enfant même en crèche est bientôt un critère de qualité de bonne crèche, voire de reconnaissance pour certains professionnels en manque peut-être de reconnaissance.

Quand mes enfants étaient en crèche, venir en atelier m’aurait été impossible. Et si mes enfants étaient en crèche, c'est bien parce dans ces lieux les relations se travaillent surtout et avant tout entre deux portes à l'arrivée des enfants et à leur départ, et c'est là que les équipes doivent travailler sur leur accompagnement, être aidées, formées.

Dans ce projet, on ne trouve rien autour de ce sujet, il aurait été bon de défendre et de valoriser des actions de supervision, etc.
Animer des ateliers parents, des ateliers parents-enfants demande des compétences spécifiques. Je ne pense pas que les professionnels petite enfance tout juste sortie de l'école sont aptes à animer de tels espaces et je dis souvent : à « parents déformés par la vie », il faut des adultes très formés.
On ne peut pas faire n'importe quoi.

Je repense à un lieu d'accueil parent-enfant animé au sein d'une halte-garderie qui se vantait d'être dans une démarche de maison verte... Un animateur BAFA et un jeune CAP petite enfance pour accueillir des familles en grande difficultés sociales et relationnelles. Ce n'est pas possible !
Je pense qu'on fait pire que mieux et la Caf ne dit rien, accepte de telles initiatives - c'est bon je pense pour les statistiques.

La coéducation est à travailler lors des adaptations, à l'arrivée au départ des enfants, lors des fêtes, à la présentation du projet pédagogique. Et il est plus judicieux me semble-t-il de réfléchir à la mise en place de temps de réunion, peut-être tous les six mois, entre le parent et le référent pour parler du projet d'accueil de leur enfant. Cela permettrait d'honorer tout le travail de qualité que vous faites avec lui et que ce que vous proposez n'est pas de la garde.

Et pour reprendre Michel Lemay : l'accompagnement de la parentalité se joue dans « l'anodin du quotidien ».
Article rédigé par : Arnaud Deroo
Publié le 29 juillet 2018
Mis à jour le 30 juillet 2018