J’ai peur. Par Arnaud Deroo

Consultant en éducation, thérapeute, psychanalyste, auteur

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bébés et pros
J'ai souffert, quand mardi soir lors d'une séance d’analyse de pratique dans une crèche, j'ai entendu l'impuissance, la fatigue, le ras-le-bol d'une équipe en charge du « groupe des bébés ».
Propos entendus à cette occasion.
    
« 6 bébés ! Comme il manque une salariée, nous étions 1 pour 6 …Du travail à la chaîne ! »

« Moi, j'ai quitté une structure privée où ne je ne pouvais ni ne voulais plus cautionner cela et j'ai peur qu'ici nous prenions cette direction ! »

J'ai eu un moment de flottement, je les comprends tellement !  Comment faire ? Comment leur redonner de l'enthousiasme dans cette conjoncture ? Quand je sais que 6 bébés par adulte, ce n’est pas pensable !
J'ai pensé au secrétaire d’État à l’Enfance et aux Familles, Adrien Taquet, lui, qui est prêt avec sa réforme des modes d’accueil à passer à un adulte pour 6 tout en rajoutant à chaque fois, comme pour se dédouaner, que c'est pour les groupes mélangés.

 Qu'est-ce qu'un groupe mélangé ?  Dans le groupe des bébés de cette crèche, les enfants sont là de 3 mois à 20 mois car il n’y a pas de place chez les moyens et les grands. C'est donc un groupe mélangé ! Et les professionnels nous disent combien ce n'est pas possible ! Et on leur dit que c'est ponctuel. Mais c’est un « ponctuel » qui dure.

Alors imaginez, quand cela va être du régulier...Le secrétaire d’État a pu participer à la dernière séance du  séminaire Premier pas de France Stratégie. Il  a pu écouter les conclusions des experts. Ce n'était pas la rue qui l’interpellait ! Et pourtant tous disent la même chose : qualifications du personnel et nombre d'adultes par enfants pour un vrai accueil de qualité.
    
Que se passe-t-il ? L’introduction d’Adrien Taquet à la synthèse des travaux était parfaite. Alors pourquoi ce clivage entre les mots et les actes ?

J'ai peur que la violence institutionnelle qui est déjà présente dans certaines structures se propage davantage.  J'ai peur que ces métiers d'artistes ne trouvent plus de candidats...  alors même que notre ministre dit qu'il faut penser à l'attractivité de ces métiers.

    « Si vous voulons la paix dans ce monde, il faut la paix dans le pays de son enfance » dit Mr A Stern. Nous sommes loin de déclarer la paix.

 
Article rédigé par : Arbaud Deroo
Publié le 04 juillet 2021
Mis à jour le 04 juillet 2021