« Accueillir un enfant, c’est accueillir sa famille » : oui, mais …Par Françoise Näser
Assistante maternelle, auteure
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J’accueillais leur bébé avec joie, et je les accueillais eux aussi avec le même enthousiasme. S’en sont suivies quelques années difficiles …Accueillir tous les parents, même ceux pour lesquels je ne ressentais aucune affinité, ceux avec lesquels je n’avais aucun point commun, était une tâche difficile, mais me semblait-il alors, indispensable. Cette famille qui se présentait à moi avec sa culture familiale, son langage, ses habitudes, méritait d’être accueillie le mieux possible. Je me devais, en tant que professionnelle de l’accueil individuel, de faire tous les efforts nécessaires pour que ces parents-là se sentent reconnus dans leur rôle de parents, acceptés, soutenus. Je devais me montrer ouverte d’esprit (même et surtout lorsque je ne comprenais pas leur manière d’agir), flexible (même si cette flexibilité à terme m’épuisait), prête à me remettre en question (jusqu’à ne plus savoir où j’en étais). Serait-ce un hasard si durant cette période nombre de parents ont confondu ma bienveillance avec de la faiblesse, mon écoute avec une thérapie ? Sous couvert de disponibilité, étais-je devenue corvéable à merci ? Est-ce un hasard si durant ces années-là, mes contrats se sont souvent interrompus brutalement, suite à des incompatibilités de caractères et des problèmes relationnels ? En voulant bien faire, trop bien sans doute, avais-je ouvert la boite de Pandore ? Il m’a semblé alors, attirer un certain nombre de parents jamais satisfaits et toujours plus exigeants, des « parents-rois » . La déception et la frustration n’étaient jamais bien loin. Que faire ?
Comment concilier le fameux (et toujours d’actualité) « accueillir un enfant, c’est accueillir sa famille » avec un fonctionnement moins chaotique, plus serein et apaisé ? Comment continuer à proposer un accueil professionnel, en accord avec mes principes mais sans y laisser de plumes ? Nécessairement, il me faudrait à l’avenir, chercher des parents-employeurs plus compatibles avec ma manière de travailler, mes objectifs et mes valeurs. Accueillir tous les parents sans aucune distinction : mission impossible, je l’avais appris à mes dépends. Un travail de réflexion et d’introspection assez long, quelques lectures professionnelles, quelques conseils de collègues m’ont amenée à mettre mes valeurs éducatives par écrit. Un projet d’accueil ? Écrire son propre projet d’accueil, c’est avant tout trier ses idées, les analyser, les faire évoluer avec chaque nouvel accueil qui apporte son lot de nouveaux questionnements. Écrire son projet d’accueil permet de poser un cadre, de pouvoir s’y référer et y revenir en cas de débordements ; il permet de garder le cap malgré les turbulences. Et surtout, il permet de trouver des parents-employeurs partageant les mêmes valeurs, ce qui réduit considérablement les risques de fiascos. Néanmoins, le projet d’accueil est-il la panacée ? Il reste un outil de réflexion et d’analyse, et non une fin en soi. Il ne peut à lui seul résoudre toutes les difficultés relationnelles inhérentes à notre profession (ce serait trop beau !).
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