Connaissez-vous le DUD ? Par Géraldine Chapurlat

Juriste

Bras bébé dans le plâtre
Quand des équipements sont endommagés et tardent à être réparés, quand un enfant subit des blessures conséquentes lors de son accueil,  quand un membre de l’équipe commet un acte qui se situe clairement en dehors des pratiques attendues, nombreuses sont les directrices d’EAJE qui ont des difficultés à distinguer les actes qui relèvent de leur responsabilité, de leur champ d’action propre,  et ceux qui relèvent de la responsabilité du gestionnaire de la structure. La réponse devrait se trouver dans un document que bon nombre de gestionnaires négligent de définir : le DUD. Le DUD : Document Unique de Délégation.

Je suis toujours étonnée de constater que l’absence de DUD est courante alors la réglementation rend obligatoire la rédaction de ce document depuis 2007. Je suis d’autant plus étonnée que l’on rencontre ces situations principalement chez les petits gestionnaires où de fait, les directions assument la quasi intégralité des actes permettant le bon fonctionnement de l’EAJE…Je le constate régulièrement, l’absence de ce document introduit un flou qui peut être préjudiciable au bon fonctionnement de la structure.
C’est le cas de cette petite structure associative gérée par les parents des enfants qui fréquentent la structure. Dans cette configuration, le bureau change tous les trois ans et la directrice doit s’adapter tant bien que mal à la manière dont les membres du  bureau s’investissent successivement dans leurs fonctions : elle fluctuera entre une autonomie totale proche de la solitude  et une immixtion du bureau dans la gestion des plannings des professionnels.
C’est aussi le cas des structures gérées par des centres sociaux, où la répartition des champs d’action avec la direction du centre social et la direction d’EAJE  est souvent compliquée à aborder pour chacun des acteurs concernés.
Il m’apparaît donc primordial que chacun situe clairement son champ d’action. En rédigeant un tel document on permet à une structure une stabilité, des repères utiles à toutes les parties prenantes pour le fonctionnement de la structure.

Le Document unique de délégation définit la nature et l’étendue des compétences et missions du  professionnel chargé de la direction. Aucune forme n’est imposée, mais le DUD doit forcément être écrit et communiqué à la PMI, il doit être en cohérence avec  les  textes légaux et règlementaires, le contrat de travail, la fiche de poste. Mais surtout il doit prendre acte de la pratique réelle du terrain. Bien évidemment le DUD variera en fonction de la configuration dans laquelle il est censé s’appliquer, il parait cependant paradoxal que ce document ne soit pas courant dans les structures où précisément l’étendue des délégations est maximale.

La plupart des structures qui n’ont pas de DUD pensent que la répartition des pouvoirs est réglée par les fiches de poste qui définissent les missions de chacun de leur salarié. Or, juridiquement les fiches de poste ne permettent pas d’organiser un véritable transfert de responsabilité : elles ne sont donc pas suffisantes pour clarifier l’organisation des pouvoirs.
Seule  l’élaboration  du  DUD  aura  un  impact  sur  le  champ  des  responsabilités  juridiques de chacune des différentes parties prenantes. Cela veut donc dire que les structures qui n’ont pas rédigé ce document ne transfèrent pas formellement la responsabilité de certains actes à la direction. Ces situations introduisent donc une zone de flou tant pour le gestionnaire que la direction. C’est encore le cas d’une structure associative, où la direction tâtonne depuis des mois pour gérer un différend avec un salarié, ne sachant pas en définitive comment procéder pour  le sanctionner disciplinairement.

La principale crainte des personnels de direction quand on parle de délégation est de voir leur responsabilité engagée alors qu’ils n’ont pas le pouvoir d’intervenir sur la situation. Le DUD permettra  un transfert de responsabilité au profit de la direction, à la condition que cette dernière dispose des moyens d’agir. C’est le cas du portillon qui ne se referme pas pour lequel la direction va signaler la situation aux services techniques en charge de la réparation pendant plusieurs semaines. Si on  transfert la responsabilité de l’entretien à la direction mais qu’elle ne dispose pas des moyens d’agir, c’est la structure gestionnaire qui restera responsable si un dommage survient du fait de ce défaut d’entretien… Encore faut-il que la direction ait alerté le gestionnaire, par écrit de préférence,  de l’impossibilité qui lui était donné de procéder à l’entretien dudit portillon…

Quand bien même il y a peu de contrôle de la part de la PMI sur la rédaction du DUD, je reste persuadée que tout gestionnaire gagnerait à préciser le champ des actes qu’il délègue à sa direction.


 
Article rédigé par : Géraldine Chapurlat
Publié le 06 avril 2018
Mis à jour le 06 avril 2018