Quel contrôle des vaccinations en crèche et chez les assistants maternels ? Par Géraldine Chapurlat

Juriste, formatrice petite enfance

carnet de santé
Alors que la question de la prise en compte de la santé est repensée au sein de l’accueil collectif avec l’apparition du référent santé et accueil inclusif, de nombreuses questions m’ont été adressées autour du cadre légal du contrôle des vaccinations.
Un grand nombre de crèches collectives exigent qu’à chaque nouvelle vaccination les familles transmettent une copie de la page du carnet de santé de leur enfant. De nombreux assistants maternels se voient sommés lors d’un contrôle de la PMI de transmettre la preuve que les enfants qu’ils  accueillent sont à jour de leurs vaccinations. Je me suis donc interrogée sur la légalité et le sens de ces pratiques. Loin de moi est de donner des arguments à des familles qui ne souhaitent pas faire vacciner leur enfant. La question est de savoir si l’on doit faire peser sur les professionnels de la petite enfance une obligation de suivi des vaccinations.

La légalité me semble douteuse à plusieurs égards. La loi rend obligatoires, depuis le 1er janvier 2018, onze vaccins. Il s’agit des vaccins contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite, la coqueluche, la rougeole, les oreillons, la rubéole, l’hépatite B, le méningocoque C, le pneumocoque et l’Haemophilus influenzae b.

Alors que le législateur rendait obligatoires ces 11 vaccins, il supprimait la sanction pénale à l’encontre des parents qui ne procéderaient à ces vaccinations. Dans le même temps était introduite  dans le code de la santé publique une disposition conditionnant l’entrée ou le maintien dans toute école, garderie, colonie de vacances ou autre collectivité d’enfants à la présentation du carnet de santé ou tout autre document attestant du respect du calendrier vaccinal. La vérification des obligations vaccinales qui pèse sur tout collectif qui accueille des enfants se réalise dans un objectif de santé publique pour protéger l’ensemble de la collectivité et n’a pas pour objet le suivi de la santé de l’enfant.

Si le carnet de santé doit donc être présenté pour l’admission d’un enfant en crèche ou chez un assistant maternel, doit-il être consulté à chaque fois qu’une nouvelle vaccination est effectuée ?
Le carnet de santé est un document médical protégé par le secret médical. Le code de la santé publique prévoit donc que l’accès au carnet de santé est  possible pour vérifier les obligations vaccinales , mais cet accès n’est autorisé par le législateur qu’à certaines périodes : à l’admission de l’enfant, puis tous les ans  Chaque année les parents disposeront de 3 mois pour présenter un document attestant des vaccinations à jour de leur enfant.

On ne peut donc exiger ou prévoir qu’un établissement ou qu’un assistant maternel organise la traçabilité des vaccins à jour. La traçabilité que l’on exige est celle d’une vérification annuelle.
Notons ensuite qu’une admission effectuée sans que ces vérifications aient été réalisées  est obligatoirement une admission provisoire de 3 mois. La convention collective du particulier employeur et de l’emploi à domicile est même allée plus loin puisqu’elle a prévu que la signature du contrat avec l’assistant maternel soit conditionnée à la vérification des obligations vaccinales. Cette disposition vise à protéger les assistants  maternels d’un engagement qu’ils devraient rompre à l’issue la période de 3 mois si les parents ne transmettent pas les justificatifs de vaccination.
Notons enfin qu’il est également prévu pour les assistants maternels que la rupture d’un contrat pour non présentation des vaccinations obligatoires s’analysera comme une rupture du fait de l’employeur, quand bien même la rupture sera actée par l’assistant maternel.
Face à ces arguments juridiques, j’entends souvent qu’en procédant ainsi, la crèche ou l’assistant maternel  n’est alors plus garant du fait que les parents aient procédé aux rappels ou engagé les nouvelles vaccinations imposées par le calendrier vaccinal. Les modes d’accueil  de la petite enfance ont encore du mal à se détacher  d’une conception sanitaire de l’accueil des jeunes  enfants.

Mais il faut garder à l’esprit que  la communication du carnet de santé de l’enfant accueilli vise un objectif de santé publique et n’a pas pour objet le suivi de la santé de l’enfant. Le contrôle des vaccinations systématique à chaque rappel est chronophage,  surtout quand on sait que les structures collectives accueillent  généralement plus du double d’enfants que le nombre le nombre de places qui leur est attribué. Au final ce contrôle ne permet en réalité que très rarement d’identifier des enfants qui n’ont pas eu leur rappel en temps voulu. Ne vaudrait-il pas mieux que ce temps soit consacré à des actions qui améliorent concrètement la santé des enfants accueillis?

 
Article rédigé par : Géraldine Chapurlat
Publié le 13 décembre 2022
Mis à jour le 13 décembre 2022