Les « tiraillements » de nos métiers et la formation ! Par Monique Busquet

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aduykte joue avec bébé
Nombreux professionnels font fréquemment part de leurs sentiments de « tiraillement ». Ils souffrent du décalage entre ce qu’ils savent des besoins des enfants et ce qu’ils peuvent faire concrètement. Ils se sentent souvent « en tension » au milieu de tout qu’ils ont à faire pour répondre aux besoins et demandes de chaque enfant accueilli.  Cela s’accompagne, avec  plus ou moins d’intensité, de tristesses et de colères, de sentiments d’impuissance et de culpabilités, de pertes de sens et désillusions.
Nous sommes effectivement nombreux à vivre ce sentiment de décalage entre la qualité d’accueil et d’accompagnement que nous aimerions proposer à tous les enfants et des réalités de terrain. Nous sommes nombreux à penser : « Mais pourquoi les connaissances sur le développement des enfants ne sont-elles pas plus prises en compte par les décideurs et financeurs ? »
Et parfois d’autres pensées peuvent émerger :  « A quoi bon connaître toujours mieux les besoins des enfants, à quoi bon se former, à quoi bon se professionnaliser plus ?  La conscience de ce décalage renforce le sentiment de ne pas faire assez, pas assez bien pour les enfants ; cela augmente la volonté de faire toujours mieux, l’exigence avec soi-même et donc le risque d’épuisement ».

Pourtant, les temps de formation sont au contraire précieux et indispensables.  Ils ont comme objectif autant la qualité d’accueil des enfants, que le soutien des professionnels qui exercent ces « métiers impossibles ».  Ils doivent leur permettre d’exprimer leurs émotions parfois trop fortes, de partager leurs ressentis et de ne pas rester seul avec leurs questions. Ils sont l’occasion de prendre du recul, de partager et s’enrichir entre professionnels, de penser ensemble. Il est vrai que se former peut être une remise en question de ses pratiques mais ne doit pas être une remise en cause de soi comme personne, ni une source de culpabilité.
La formation vise à donner des éclairages, à comprendre le sens des comportements des enfants et de nos réponses. Elle peut proposer des outils concrets, sans être une liste de méthodes ou consignes à appliquer telles quelles, bien au contraire. Mieux comprendre ce que les enfants manifestent, savoir mieux voir ce dont ils ont besoin, reste un socle et une ressource fondamentale dans l’exercice de nos métiers.
La formation permet également de comprendre ce que sont ses responsabilités, de savoir en reconnaître et accepter les limites. Cela peut aider à être moins exigeant avec soi-même. Cela permet de pouvoir faire la différence entre le périmètre de se propre responsabilité et les responsabilités collectives concernant la place et les propositions faites aux jeunes enfants dans nos sociétés.  La formation aide à nourrir sa posture professionnelle :  « faire ce que je peux, de ma place, sans vouloir faire plus que je ne peux ! »

Les propositions de formation et d’analyse des pratiques ont comme objectifs d’aider à mieux vivre ces tiraillements, voire les grands écarts quotidiens entre « ce que je voudrais et les possibles ».  Elles visent à donner à chacun plus de solidité pour ce travail d’acrobates que sont les métiers de la petite enfance. Elles cherchent à permettre à chacun de rester en mouvement tout en gardant l’équilibre, à construire des dynamiques de travail les plus sereines possibles. Elles cherchent à affiner et soutenir les capacités d’attention aux enfants en se souvenant qu’ils perçoivent les réelles intentions, au-delà des actes.
 
Article rédigé par : Monique Busquet
Publié le 30 mai 2022
Mis à jour le 30 mai 2022