Des assistantes maternelles et des hommes. Par Nadège R

Assistante maternelle

homme et jeune enfant
Depuis quelques années, le métier s'est ouvert aux hommes. Travailler avec des enfants est, loin des clichés, un métier de patience et d'amour, un savoir-faire de générosité, et ne nécessite heureusement pas de porter un soutien-gorge pour cela. Au même titre qu'il n'est pas obligatoire d'avoir soi -même des enfants pour s'occuper des petits.

Les hommes ont fini par avoir accès à notre superbe métier et je me suis interrogée sur l'accueil qui pouvait leur être réservé, dans des temps où les contrats peuvent être difficiles à trouver, à garder. Si moi, femme dans ce milieu, et de surcroît en MAM, peux parfois trouver la recherche d'enfants si compliquée, alors qu'en est-il pour un homme ? En effet, être un homme dans ce métier est-ce un atout ou un motif de rejet ?
Comment ont-ils été accueillis à tous les échelons (PMI, parents-employeurs, RAM et collègues féminines). Et comment la famille, les amis, ont-ils accueilli la nouvelle ?
Afin de mieux répondre à ces questions, j'ai interrogé des assistants maternels ainsi que des parents-employeurs ayant fait garder leur enfant par un homme. Synthèse…

Tout d'abord, sur les hommes interrogés, il semblerait que l'accueil par la famille et les amis soit positif. La plupart ont été encouragés à travailler dans cette voie, ni moqués, ni jugés. Souvent suite à une reconversion, cette nouvelle a été accueillie avec entrain par l'entourage. 
D'autres, en revanche, ont connu davantage de déconvenues. Entourage masculin moqueur. Réfractaire pour les femmes !
« Tu ne trouveras jamais d'enfants à garder. Nous, on te connait, ce n’est pas pareil, mais moi j'ai déjà eu du mal à laisser le petit chez une assistante maternelle, je n'aurai pas eu confiance si en plus c'était un homme. »
Pour d'autres, ce fut la Pmi, pas toujours bienveillante selon la région, la ville. Tentative pour dissuader de continuer dans cette voie, moquerie même : « si un homme pouvait faire le travail d'une femme en ce domaine ça se saurait ». 

Reste enfin l'accueil des parents, la recherche d'emploi, pour certains ce fut un véritable calvaire. Certains n'ont aucun appel. D'autres peinent à trouver. Certains parents sont attirés, viennent rencontrer l'assistant maternel, mais prennent peur et ne sautent pas le pas. Heureusement, beaucoup d'autres parents sont finalement très agréablement surpris lors du premier entretien et se décident à franchir le pas.
« Nous n'avons eu aucun regret d'avoir fait appel à un assistant maternel. Notre fille à passer 3 années merveilleuses et même si au début je me posais quelques questions, mes doutes ont rapidement été éteints. Notre famille nous a reproché ce choix au départ, que l'on pouvait tomber sur un pédophile, un maltraitant mais ça nous a encouragé à le garder et cela sans regret. »

Car être un homme dans ce métier, c'est déjà montrer sa motivation sans faille : Tonton Manu, assistant maternel de Normandie, connu pour sa page Facebook du même nom, nous le raconte avec humour : « effectivement j'ai eu des inquiétudes sur le fait que des parents puissent confier leur petit à un homme. Le fait aussi que je sois gay. Peur que ce soit mal vu, car les gens se font une idée sur certaines personnes sans même les avoir rencontrés. Alors un homme gay voulant travailler avec des enfants c'est bizarre non ? »
Au final pour lui tout a été positif : l'entourage encourageant, la PMI et le RAM l'ont accueilli comme un prince. Aucune difficulté à trouver des enfants à accueillir.
Néanmoins pour ne pas être bloqué, il a dû se résoudre à travailler sur une large plage horaire, cela 6 jours sur 7 pour toucher plus de parents.
Est-ce dû au fait qu'il est un homme ? Pas forcément. Travaillant à son domicile, un homme peut rencontrer le même souci que ses collègues féminines, la pénurie de contrats force les assistant(e)s maternel (le)s à élargir l'amplitude de garde selon les villes pour toucher les parents aux horaires plus larges.
L'expérience a été tout aussi positive pour Monsieur nounou, assistant maternel suite à une reconversion, mais parsemé de doutes : « Disons qu’une fois qu’on se retrouve en réunion avec 38 femmes et juste un mec, on doute un peu oui. Je me suis demandé si je n’étais pas victime de ma propre excentricité. Mais je me suis dit tant pis, j’irai au bout quand même. Je n’ai pas senti de propos particulièrement négatifs de la part des autres aspirantes-assmats ou de celles qui étaient déjà établies. Lors de la formation initiale, nous étions deux hommes, à mon sens plutôt bien accueillis. » 

Pour bon nombre d'entre eux c'est la bouche à oreille qui a été le tremplin nécessaire : avoir pu convaincre une famille, faire ses preuves et toucher ainsi de plus en plus de monde.
« Mes débuts ont été longs à se faire… Je suis resté 6 mois avec juste 2 contacts qui n’ont rien donné. Puis finalement, c’est une amie-assmat ma femme qui m’a envoyé mon premier couple de jeunes parents pour un petit contrat. Puis je suis resté à nouveau 6 mois avec un minuscule salaire avant d’avoir une deuxième famille, via la première, et enfin j’ai pu avancer un peu, même sans fortune. »

Il est évident que lorsqu'on écoute les témoignages de ces assistants maternels, leur motivation n'est plus à remettre en doute. Faire sa place dans un milieu majoritairement féminin, est loin d'être chose aisée, heureusement il ressort que les PMI et les RAM restent favorables dans l'ensemble à l’ouverture aux hommes de ce métier. Quant aux collègues assistantes maternelles, elles voient d'un très bon œil l'arrivée des hommes dans la profession. C'est pour elles un autre regard sur l'enfant, une autre façon de travailler, un renouveau qui fait du bien. Tonton Manu explique que les collègues femmes qu'il rencontre sont plutôt contentes d'échanger avec un homme, pour avoir son point de vue sur certains sujets.

Pour conclure, malgré certaines PMI et certains parents méfiants, le message de ces hommes aux autres hommes est plutôt positif et encourageant. 
Monsieur nounou plaisante : « La seule crainte que j’ai toujours eue été le côté « mec avec des enfants » qui peut faire voyager l’imagination des personnes néfastes. Je me suis souvent dit – et je me dis encore – que si demain la presse étalait l’histoire d’UN assmat pédocriminel et/ou négligeant, violent, etc… je pourrais mettre la clef sous la porte car ça reste compliqué. Il y a très peu d’hommes, sans doute pour des raisons financières d’une part et aussi parce qu’il y a toujours le risque d’être dévalorisé et moqué. C’est dommage, je pense qu’à la maison comme en crèche, il y a de la place pour nous et que tout le monde en sortirait gagnant. »

Alors messieurs, on vous attend !


 
Article rédigé par : Nadège. R
Publié le 03 février 2020
Mis à jour le 03 février 2020