Quand les assistantes maternelles se mettent à douter ! Par Nadège R

Assistante maternelle

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bééb joue
Nous vivons en 2020 quelque chose dont on se souviendra toujours. Cette crise sanitaire va profondément changer notre monde et aussi notre économie.
Aujourd'hui nous avons peur. Peur de tomber malade, de mourir ou de perdre un proche. Peur de ne pas se relever économiquement quand tout sera fini. Peur pour notre pays.

Comme l'a très bien dit Françoise Näser dans sa chronique, nous, assistantes maternelles, sommes en bout de chaîne. Si nos employeurs perdent leur emploi, nous en serons obligatoirement impactées ! Nous avons peur et c'est humain. C'est normal.
Chez nous ou en MAM, notre avenir est incertain. Nous avons peur de ne pas nous relever.

Pour celles qui ont acheté leur MAM, elles ont un crédit sur le dos à rembourser, si nous traversons une crise économique après cela, comment rembourser des traites en plus de celles de notre foyer ? Outre l'impact économique, c'est un rêve qui s'effondre.
Combien de MAM allaient ouvrir incessamment sous peu et se retrouvent avec des loyers à payer en attendant d'ouvrir, qui dépassent largement les 4 mois de loyer dans le vide qu'elles avaient financièrement prévus ? Et n'ayant pas encore ouvert elles n'ont droit à rien pour les aider. À part espérer un geste de la part du propriétaire en leur faisant grâce des loyers jusqu'à l'ouverture il n'y aucune solution pour elles. Des MAM n'ouvriront pas comme prévu car elles y auront laissé toutes leurs économies.

Et au -delà de cet impact économique c'est un impact moral qui nous tiraille aussi. Pour celles qui n'accueillent plus les petits car les parents ont fait le choix de les garder, c'est toute une remise en question qui s'opère. Un sentiment étrange de ne plus être utile. De ne servir à rien. Les parents occupent leur tout-petit, tout en travaillant de chez eux. Certains trouvent même le temps de faire des activités de Pâques. "Coucou Nounou, regardez cette belle poule que nous avons fabriquée". "Bébé a commencé à marcher la semaine dernière !". En ne pouvant plus travailler, nous perdons de précieux moments et d'une certaine façon, un peu de notre importance auprès de nos employeurs.

Quand j'ai reçu des nouvelles de mes employeurs et des enfants, j'étais ravie. Aux anges. Ils ne m'oublient pas. Ils pensent à moi. Mais de suite un sentiment étrange s'est immiscé : ils ont l'air de bien concilier leur travail et leur enfant ! Ils ont leur de bien se débrouiller.
Ils ont même le temps pour de la peinture, pâte à modeler. Je me suis même dit qu'en plaisantant entre eux, mes employeurs allaient se dire que ce n'est un travail si difficile finalement que le métier d'assistante maternelle.

Je me sens…tout, sauf irremplaçable ! Et je ne suis pas la seule. Beaucoup d'assistantes maternelles ont du mal à trouver leur place et la bonne attitude à avoir en ce moment. Tiraillées pour certaines entre le soulagement de ne pas travailler et la peur d'être remplacées.
Et finalement je vais me mettre une gifle ! Comment ça pas irremplaçable ???!!!

Garder son propre enfant ça passe encore, mais nous, nous apportons à ces petits en accueil quelque chose de différent de papa et maman : notre expérience déjà, notre patience. Chez nous ils retrouvent un cocon à part, les petits copains, les super jeux ! Et puis tout comme moi il me tarde de reprendre le travail, sûrement que mes employeurs ont hâte aussi de retrouver leurs habitudes, leur travail. Même si certains voient ce confinement comme une parenthèse familiale.
Non, on va se battre. Ce confinement nous chamboule, nous bouscule, nous fait peur. On se met à douter du présent, de l'avenir. De notre importance près du tout petit. Mais il nous faut retrouver un semblant de foi et d'espoir ! 

Même si nous sommes en bout de chaîne, notre métier est de la plus haute importance. Nous élevons les tout petits en l'absence de leurs parents, nous les protégeons, les aimons, les câlinons. Les préparons à l'école aussi, à la séparation, à la patience, au partage. A s'aimer et s'accepter. A accepter et comprendre leurs émotions et celles de leurs petits camarades.

Il faut tenir bon et garder l'espoir. Nous sommes utiles ! Nous sommes juste dans l'impossibilité pour certaines de travailler. Mais bientôt, nous allons pouvoir reprendre notre rôle. Et je suis sûre que c'est avec plaisir que les parents nous retrouveront !
 
Article rédigé par : Nadège.R
Publié le 14 avril 2020
Mis à jour le 14 avril 2020