Isou Landin, directrice de L.I.R.E à Paris : « Il est important de privilégier les moments de lectures individualisés »

Créé en 1998, L.I.R.E à Paris (le Livre pour l’Insertion et le Refus de l’Exclusion) fait entrer le livre dans la vie des petits en allant les voir là où ils sont : les centres de PMI, les Relais d’assistantes maternelles (RAM), les crèches de centres sociaux, de centres d’hébergement mères/enfants, en pouponnières et dans des parcs et jardins. L’association milite pour que la lecture soit accessible à tous quelque soit leur milieu socio-culturel. Zoom sur la façon dont les 14 lecteurs professionnels de l’association travaillent, avec Isou Landin, directrice et responsable des formations.
Les Pros de la Petite Enfance : Quels sont les buts de L.I.R.E à Paris ?
Isou Landin : il s’agit de familiariser les enfants au monde du livre et du récit dès leur plus jeune âge. Nous insistons sur la dimension du plaisir de la lecture. C’est pourquoi l’un des buts de l’association est de favoriser entre enfants et parents le plaisir du partage des premiers mots écrits, des premières histoires.
Les parents sont souvent présents aux séances de lecture, ils constatent l’intérêt que leur tout-petit porte aux livres, ce qui permet de les encourager à poursuivre les lectures avec leur enfant, il peut s’agir simplement de regarder les livres avec lui.
Nous donnons beaucoup d’importance aux échanges avec les parents, afin de leur donner envie d’inclure les livres dans la vie quotidienne des leurs enfants.
En partenariat avec les bibliothèques jeunesse, nous impulsons et soutenons une dynamique d’échanges autour des livres et des tout-petits avec les professionnels de la Petite Enfance.

Quelles animations organisez-vous en direction des professionnels de la petite enfance ?
Nous co-animons avec les bibliothécaires les « comités de lecture Petite Enfance ». Ils se tiennent dans des bibliothèques, 3 à 5 fois par an. Bibliothécaires, lecteurs de l’association et professionnels de la Petite Enfance lisent et analysent des albums, échangent entre eux sur la leurs pratiques de lecture avec les enfants et sur des observations des enfants en situation de lecture.
L’association propose des formations « Livre et Petite Enfance » pour les professionnels (auxiliaire de puériculture, éducatrice-eur de jeunes enfants, directrice, etc.), futurs professionnels et des bénévoles.

Quels conseils donneriez vous à des professionnels de la Petite Enfance qui souhaiteraient organiser des activités autour du livre ?
Il me semble important de favoriser des moments de lecture individualisée, même si ces temps ont lieu dans l’espace collectif de la structure. L’enfant doit pouvoir s’approprier l’objet-livre qu’il touche d’abord comme n’importe quel objet : il le manipule et a tendance, au début, à l’explorer avec sa bouche. Une discussion a souvent lieu à ce sujet avec les professionnels, qui hésitent à proposer des livres aux bébés, car ils risquent de les abîmer. Il ne s’agit pas, bien sûr, de laisser faire cela. Il s’agit d’accompagner le jeune enfant dans sa découverte, de l’aider quand il ne peut pas encore faire tout seul.
L’enfant, le lecteur ou la lectrice et le livre sont trois « éléments » qui doivent interagir. L’adulte sert de médiateur entre l’enfant et le livre. L’enfant n’est pas encore lecteur de textes, mais il est lecteur d’images, il peut passer beaucoup de temps à en observer chaque détail. Il faut lui laisser l’initiative. Il peut sauter des pages, s’éterniser sur l’une d’entre elles ou les regarder dans le désordre.
C’est un temps pour lire avec lui en respectant son rythme personnel et ses compétences du moment.
Lorsque la lectrice (ou le lecteur) lit, l’enfant entend que sa voix prend une musicalité différente de celle du parler habituel. L’enfant est intrigué. Petit à petit, il fait le lien entre cette intonation particulière et la lecture, entre la voix qui lit et la page du livre. Il répète ce qu’il entend, il s’approprie les mots… Il faut laisser la place à ses gazouillis, à ses sourires, lui montrer qu’on prend en compte ce qu’il « dit »
Or, une lecture collective ne permet pas cet échange.

Comment repérez-vous les livres qui sont particulièrement susceptibles d’intéresser les enfants ?
C’est en observant leurs réactions en situation de lecture que nous pouvons constater qu’un livre intéresse un ou plusieurs enfants.  

Votre association, comme son nom nous l’indique, intervient à Paris. Avez vous connaissance de l’existence d’associations du même type dans d’autres lieux en France ?
Oui, particulièrement l’agence Nationale « Quand les livres relient » qui regroupe des associations de plusieurs villes de France et A.C.C.E.S (Association pour le développement de la lecture, la prévention de l'échec scolaire et la lutte contre les exclusions)

Pour aller plus loin

A lire : « Lire en chantant des albums de comptines » sous la direction de Sylvie Rayna, Chloé Séguret et Céline Touchard, érès. Rédigé par l’équipe de L.I.R.E à Paris, cet ouvrage montre l’intérêt des comptines pour les petits et les grands. Éditions Érès, collection Enfance et Parentalité. « On ne lit pas tout seul !, Lectures et Petite Enfance», sur la direction de Sylvie Rayna et Olga Baudelot, Erès « Ces livres qui font grandir les enfants », Joëlle Turin, Didier Jeunesse.

Article rédigé par : Nicole Amram
Publié le 22 février 2016
Mis à jour le 16 août 2016