Terry Berry Brazelton, Celui qui parlait aux bébés. Par Drina Candilis-Huisman

Psychologue, psychanalyste *

Brazelton
Le Dr. T.B. Brazelton (1918-Waco, Texas / 2018-Barnstable, Massachusset) est mort en  mars 2018 au terme d’une très longue carrière de pédiatre au service des nourrissons et des jeunes enfants.
Mondialement reconnu, ses travaux défendaient une pédiatrie humaniste au service des bébés et de leurs familles dans la lignée d’un autre grand pédiatre américain des années 50, le Dr. Benjamin Spock. Personnage charismatique, médiatique et scientifique, il a occupé pendant près de 50 ans la chaire de pédiatrie à l’hôpital pour enfants de l’Université de Harvard à Boston et il a fondé un célèbre institut de formation et de recherches - le Brazelton’s Center- où sont passés tous les plus grands spécialistes de la périnatalité de ces 50 dernières années.

Après une psychanalyse personnelle, il a développé des recherches sur les capacités interactives des nourrissons dans le laboratoire de Jérôme Bruner, pionnier de la psychologie périnatale. Il a mis au point dès 1973 une échelle d’évaluation des comportements des nouveau-nés, outil d’observation plusieurs fois remanié et republié (1984-1995-2001 pour la traduction française) qui ouvre une fenêtre sur les premiers comportements des bébés dès le séjour en maternité. En montrant aux jeunes parents comment s’ajuster au tempérament de leur nouveau-né, il favorise une démarche de prévention des éventuels dysfonctionnements des relations précoces. « Don’t blame the victim » avait-il coutume de dire - ne jetez pas la pierre aux parents- pour insister sur la part propre du bébé dans la construction des premiers liens et mieux soutenir les difficultés que posent les nourrissons pour les parents isolés et démunis de nos sociétés contemporaines. Il avait aussi mis au point un « calendrier de développement » des enfants de 0 à 6 ans : les Points-forts, destinés à anticiper les nécessaires remaniements de la parentalité devant les avancées du développement. Par exemple, un enfant sur le point d’apprendre à marcher à la fin de la première année peut manifester son excitation et sa frustration de ne pas encore y arriver par un retour passager aux troubles du sommeil du nourrisson.

Mais Berry Brazelton n’étais pas seulement le pédiatre d’émissions populaires de la télévision ou l’invité habituel de la Maison Blanche sous les Clinton, il s’intéressait à tous les enfants et animait des groupes de paroles réguliers dans les quartiers les plus déshérités des grandes villes américaines. Sous l’influence de l’anthropologue Margaret Mead dont il était l’ami, il avait mené de larges études comparatives entre les populations blanches et favorisées de la côté Est et les enfants du Guatemala, du Mexique, mais aussi du Ghana, du Kenya et de plusieurs pays asiatiques démontrant les forces de vitalité des nouveau-nés. Il insistait sur l’influence réciproque de la biologie, de la culture et des représentations des parents, anticipant ainsi sur les études actuelles sur l’épigénèse.

Enfin avec son équipe et notamment Heidelise Als, il a été pionnier en matière de soins aux prématurés avec le programme du NICAP (neonatal individualized developmental care and assesment program) consistant à humaniser les soins auprès de ces enfants si vulnérables. Son travail concerne tous les acteurs destinés à soutenir les premiers temps de la vie et au-delà : pédiatres, psychologues, puéricultrices, sages-femmes ou psychomotricien(ne)s. C’est grâce à Laurence Pernoud que nous avons eu en France accès à ses livres devenus des best-sellers : Trois bébés dans leur famille, Famille en crise ou Les Points-forts, ouvrages qui resteront des modèles pour une approche sensible et adaptée aux besoins de chaque enfant et de leur famille et à leur éducation.

*Auteur chez Ères de  T. Berry Brazelton. Ce que nous apprennent les bébés

Pour en savoir plus

Article rédigé par : Dina Candilis
Publié le 16 mars 2018
Mis à jour le 26 mars 2018