Alice, EJE à domicile : aider chaque enfant à trouver sa place

Alice Fanouillère n’est pas une éducatrice de jeunes enfants comme les autres… Elle a choisi d’exercer au domicile des familles ! A seulement 32 ans, la jeune femme a déjà une longue expérience d’accompagnement des petits et de soutien à la parentalité que ce soit en tant que bénévole, monitrice éducatrice ou EJE. Des passions qui la poussent toujours plus loin.

L’ouverture aux familles depuis toujours
Pas de doute, pour Alice Fanouillère, travailler auprès des enfants, en situation de handicap ou non, a toujours été une vocation. Dès ses 18 ans, cette jeune bretonne passe son Brevet d'Aptitudes aux Fonctions d'Animateurs (BAFA) et connaît sa première expérience d'accompagnement d'enfants en situation de handicap l'année suivante, en 2005, au sein de l'association EPAL. Puis c’est à Grenoble qu’elle commence par suivre une formation de monitrice éducatrice de 2007 à 2009. Elle fait alors pour la première fois de l'accompagnement à domicile et du soutien à la parentalité en tant qu’auxiliaire de vie sociale (AVS) auprès d’un enfant polyhandicapé de 2 ans et son frère de 18 mois.

Une expérience très riche qu’elle poursuit après l’obtention de son diplôme en 2010 en rejoignant une association d’accompagnement éducatif pour les familles touchées par un handicap à Grenoble. « Nous intervenions en fonction des besoins de chacune. J’ai alors découvert les enjeux qui concernaient particulièrement ces familles, explique-t-elle, comme le maintien de l’activité professionnelle, le droit au répit… » Puis elle travaille à Lyon dans une association pour adultes en situation de handicap mental et psychique.

En parallèle, Alice s’investit dans des centres de loisirs et de nombreux projets de bénévolat : elle réalise notamment deux voyages avec l'association Chaîne de l'Espoir au Burkina Faso et participe au Lieu d’Accueil Enfants Parents (LAEP) itinérant Tricotin qui accueille des enfants dits valides et en situation de handicap.

Connaître le développement de tous les enfants
Mais après quelques temps, Alice ressent le besoin d’élargir ses compétences. « Je me suis rendue compte que j’avais surtout appris à accompagner les personnes en situation de handicap, mais que je n’avais pas vraiment acquis les notions du développement classique du jeune enfant. » Elle frappe alors aux portes des établissements d’accueil du jeune enfant (EAJE) et intègre un multi-accueil pour trois ans. L’occasion pour elle d’aider l’équipe à s’adapter aux besoins spécifiques d'une petite fille en situation de handicap, mais surtout d’apprendre auprès d’eux les enjeux des premières années de la vie : l’alimentation, le sommeil, l’éveil, également comment observer. « C’était un réel échange de savoirs, raconte-t-elle. J’ai redécouvert le jeune enfant. »

Alice découvre également les différentes pédagogies, notamment les principes de motricité libre et de référence de l’approche Piklérienne. Elle devient d’ailleurs référente d’un groupe d’enfants et retrouve ce lien de proximité et de confiance avec les familles au quotidien.

EJE indépendante, la concrétisation d’un projet professionnel
Pour parachever cette nouvelle étape professionnelle, Alice se lance dans une validation des acquis de l’expérience (VAE) EJE en 2015 - « une reconnaissance de tout mon vécu professionnel et associatif », dit-elle. Diplômée l’année suivante, elle en profite pour revenir s’installer en Bretagne, près de Dinan. Elle effectue un remplacement d'un an et demi en Institut Médico-Educatif (IME) auprès de jeunes enfants en situation de polyhandicap et de troubles envahissants du développement.

Mais très vite, l’envie de créer sa micro-entreprise la travaille : elle veut devenir EJE à domicile* pour accompagner les enfants de 0 à 7 ans. Un projet peu commun quand on sait que ce sont souvent les éducateurs spécialisés qui travaillent à domicile, pas les EJE. « Cela faisait sens dans mon parcours, explique-t-elle : après avoir été AVS puis salariée de structures, je souhaite mettre mes compétences au service des familles en tant qu’indépendante. Et revenir à l’environnement familial est important pour moi car c’est le premier lieu de socialisation des enfants. »

Alice entreprend alors des études de marché et soumet des sondages à des associations. Les réponses de mamans ayant un besoin d’accompagnement à domicile la confortent dans son projet. Elle fait une demande à l’URSSAF en janvier 2018. « Ce n’était pas évident, je ne rentrais pas dans les cases. Il a fallu créer une mention EJE en libéral. »

Un travail de partenariat
Alice a donc choisi de faire un travail de proximité, ponctuel ou régulier, auprès des familles. « Me rendre dans l’espace de vie des enfants donne un tout autre sens à l’accompagnement, souligne-t-elle. Mais ils peuvent aussi être accueillis en collectivité la journée et avoir un accompagnement ensuite à la maison, c’est complémentaire. »

Cette notion de complémentarité est très importante pour elle car elle tient à travailler en partenariat avec tous les acteurs qui entourent l’enfant. Elle fait d’ailleurs partie d’un pôle de compétences et de prestations externalisées (PCPE). Un service créé en 2016 par les Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH) pour répondre aux besoins des familles sans solution ou sur liste d’attente. Dans ce cadre, elle intervient auprès d’enfants en situation de handicap à domicile en collaboration avec plusieurs professionnels : psychologues, psychomotriciens, orthophonistes… « On réfléchit ensemble à la meilleure façon d’accompagner l’enfant, c’est un vrai travail de coordination. »
Alice développe aussi des partenariats avec les différentes structures culturelles environnantes, comme la bibliothèque de Corseul où elle va animer des lectures thématiques, « Les P’tits lecteurs curiosolites » : les émotions fin mai, les monstres en juin... « L'accès à la culture pour tous et l’éveil à la littérature jeunesse sont deux valeurs que je défends, précise-t-elle. Cela procure du plaisir, de la curiosité, et favorise l’attention, l’imagination, la créativité, le langage, la communication... »

Elle propose également aux familles des « bons cadeaux naissance » : deux heures d’accompagnement des parents à leur retour de la maternité. En fonction des attentes, elle leur donne des repères, des conseils sur l’alimentation du nouveau-né, le sommeil… « Les parents ont souvent besoin d’être guidés et rassurés pour prendre confiance en eux à la naissance de leur bébé, précise-t-elle. Et le domicile donne une intimité qui facilite le dialogue car il n’y a pas de jugement extérieur. »

Aider là où on a besoin d’elle
Tout se concrétise pour Alice qui vient de commencer l’accompagnement d'un garçon dans le cadre du PCEPE et l'accompagnement à domicile d’une enfant autiste de 5 ans à Dinan. En fonction de la demande et des besoins des parents, elle vient chercher la petite à l’école et accompagne son éveil, sa socialisation, son développement éducatif dans le quotidien à domicile : repas, lecture, habillage… mais aussi rires et petits plaisirs ! Elle lui propose également des temps de jeu et de sorties. « Je ne reste pas enfermée avec l’enfant à la maison, je peux l’accompagner au parc, à la bibliothèque, à la piscine... Je compose avec les compétences et la disponibilité de l’enfant à l’instant T. Il faut être créatif, tout est à construire, tout est possible ! » assure-t-elle.

Pour Alice, l’apprentissage n’est jamais terminé. Elle suit des formations en continu, sur le développement de l’enfant, la psychomotricité, la langue des signes, le portage, la communication bienveillante... Elle a également participé à différents jurys (comme l'entrée en formation d’EJE) et est membre de la Fédération Nationales des Educateurs de Jeunes Enfants (FNEJE), ce qui lui permet de suivre la législation, les droits et devoirs en lien avec sa profession.

La jeune femme se considère comme « multi-casquettes », mais elle tient à rappeler que son rôle d'accompagnante reste toujours le même. « Un enfant, en situation de handicap ou pas, est un enfant. Il tient une place particulière dans sa famille et c’est là que j’apporte ma petite graine pour l’aider à s’épanouir. »
 

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Article rédigé par : Armelle Bérard Bergery
Publié le 29 mai 2018
Mis à jour le 09 décembre 2018