Nounou et pas encore maman ... Par Nadège R

Assistante maternelle

béb content
Garder des enfants quand on en a pas soi même c'est quelque chose d'assez fréquent quand on y pense. J'ai moi même débuté très jeune à 22 ans, pour avoir mon premier enfant à 29 ans. 7 ans de bons et loyaux services à chérir les enfants des autres, à les gronder parfois, les câliner souvent…Travailler auprès d'enfants est le plus beau métier du monde à mes yeux, je ne verrais pas ma vie autrement.
 
Sauf que parfois, on travaille dans le domaine de la petite enfance et la fée cigogne se fait attendre. Au début ce n'est pas grave. Travailler avec des enfants devient un substitut à cette absence de maternage. Ça se complique pourtant dans certains cas.
Quand non seulement la cigogne met du temps à venir et que, en plus, elle nous balance un caillou dans la face ! Un boomerang, un frisbee ! Tout ce que voulait qui pourra traduire l'idée que  : « tu vois ces enfants que tu gardes, ces bébés que tu changes, que tu nourris, ces premiers sourires, ces premiers pas…? Bah regarde les bien ! Car c'est pas pour toi ! »

Chère nounou (ou auxiliaire en crèche, puéricultrice etc), tu mets tout ton amour dans ton travail, et aujourd'hui tu comprends que ces petits yeux qui te regardent ne seront jamais une partie des tiens…N'est-t-elle pas injuste la vie? Tu oscilles entre tristesse et colère, mais tous les matins tu dois sourire...déjà parce qu'il le faut et puis parce qu’il est difficile de ne pas craquer devant de jolies bouilles.
Tous les jours tu dois être forte : toi qui viens de faire une fausse couche, toi qui as perdu la vie, toi qui penses ne jamais pouvoir la donner… Qu'il est dur de sourire devant un nourrisson qui commence juste son adaptation, qu'il est dur parfois aussi de ne pas trop s'attacher et s'investir.

Car le besoin, devenu immense, peut parfois nous pousser à nous attacher, ou à contrario nous détacher de ces bouts de chou. Combien il est difficile d'avoir et de garder, cette bonne distance envers les enfants accueillis.
Et cette question, que tu as peut être déjà toi même entendu milles fois, « alors quand est ce que vous nous faites un petit ». Question posée par un parent blagueur, souvent gentil ou cette collègue de travail… Ils ne savent pas, alors là encore tu souris…

Je vous parle d'un vécu. Je vous parle de moi qui suis venue travailler une demi- heure après qu'on m’ait annoncé que je ne pourrai peut être pas concevoir un enfant sans aide médicalisée, je vous parle d'une collègue et amie, qui a vu défiler des femmes enceintes tandis qu'elle cumulait les fausses couches. Je vous parle de ces femmes qui n'ont jamais pu avoir un enfant et l'ont pourtant tant désiré et qui, tous les jours, ont dû garder leur cœur ouvert pour accueillir l’amour si précieux des petits qui nous sont confiés.

Moi mon miracle a fini par arriver. J'ai pu remettre les bonnes distantes, créer les liens comme il le faut… Sans culpabilité ni regrets.
Mais je pense à toutes celles qui doivent sourire tous les jours en regardant des enfants jouer, en se demandant si un jour elles entendront ces rires à la maison.
Publié le 05 septembre 2018
Mis à jour le 06 septembre 2018