Remise du rapport du Conseil de l’enfance du HCFEA sur la qualité des modes d’accueil à Christelle Dubos et Adrien Taquet

Jeudi 25 avril à 16h, Sylviane Giampino a remis officiellement à Christelle Dubos et Adrien Taquet, secrétaires d’État auprès de la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn, le rapport sur le « Pilotage de la qualité affective, éducative et sociale des modes d’accueil de la petite enfance » du Conseil de l’enfance et de l’adolescence (HCFEA) qu’elle préside. Un rapport, rappelons-le, adopté à l’unanimité par le Conseil.

La qualité en petite enfance au cœur du rapport

Le rapport s’inscrit dans les travaux prévus par le Conseil, mais fait suite aussi à la saisine conjointe d’Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé, et de Christelle Dubos, secrétaire d’État à la Famille. Il précise d’emblée que la qualité d’accueil est « définie comme qualité affective, éducative et sociale » et concerne « toutes les parties prenantes du secteur de la petite enfance ».
Ce rapport centré sur la notion de qualité ne manquera pas de provoquer quelques débats. Les avis divergent encore parfois sur cette notion même de qualité et surtout la façon dont elle peut être mesurée, évaluée. Tout un chapitre du rapport, très documenté avec moult références scientifiques et recherches nationales et internationales, tente de la définir en petite enfance. Avec honnêteté. En envisageant ce qui fait consensus et ce qui ne le fait pas encore. Et il prend position parfois. (Voir ci-dessous).

24 repères de qualité et 22 propositions de pilotage
Le rapport, en appui avec les 10 articles du Texte-cadre national de l’accueil du jeune enfant, propose 24 repères de qualité et 22 propositions pour un pilotage de la montée en qualité des modes d’accueil collectifs et individuels. Ces dernières, selon le communiqué de France Stratégie, partant des « fondamentaux du développement et de l’épanouissement des jeunes enfants dans la perspective d’une meilleure égalité entre les enfants et prise en compte de leurs familles ».
 
Vers un référentiel de qualité commun aux acteurs de la petite enfance
Les 24 repères répertoriés dans le rapport donnent le ton. Il s’agit d’offrir « un accueil de l’enfant personnalisé et ajusté au contexte familial et social ». Pour cela chaque lieu d’accueil devra étoffer son projet social, son projet d’établissement et d’accueil. Par ailleurs ils insistent et explicitent les « modalités d’interactions avec les enfants et de pratiques régulières favorables à leur sécurisation affective, leurs repères relationnels, leur développement sensori-moteur, langagier et logique, leur socialité et leur sensibilité culturelle et environnementale ». Mais aussi proposent des pistes pour des modes d’accueil bien-traitants envers les enfants et ouverts sur l’extérieur.
Voilà la tonalité générale de ce que pourrait être ce référentiel d’un accueil de qualité. Dans le détail, on comprend que le Conseil de l’enfance défend une conception holistique du développement de l’enfant et semble se mettre en retrait sur les programmes pédagogiques clefs en mains, dits compensatoires, destinés à lutter contre certaines inégalités notamment langagières.
Mais, et la présidente du Conseil le précise très clairement dans son préambule, si « ce référentiel relève le défi de proposer un pilotage national, », il n’a pas « d’objectif d'homogénéisation des pratiques et des systèmes ». Et d’ajouter : « Le Conseil de l'enfance du HCFEA prend le parti de fournir des appuis fiables et opérationnels instruits des enjeux centraux, et de laisser une place à l'initiative, la construction, au lieu des systèmes de normalisation, labellisation, certifications... ». Voilà qui est très clair. Et qui annonce la place que le Conseil souhaite donner à la réflexivité et à l’analyse des pratiques. Et sa réserve face aux certifications et labels.

Le pilotage de la montée en qualité : réflexivité et auto-évaluations
Les propositions du rapport, non liées directement aux 10 points du texte-cadre ont vocation à faire évoluer le cadre normatif, mais mettent surtout en avant ce qui constitue la base de toute amélioration de l’accueil : l’amélioration des pratiques, la réflexivité régulière, la professionnalisation et la reconnaissance des métiers de la petite enfance. La question de l’évaluation des pratiques en termes de pédagogie mais aussi de résultats (donc d’effets sur les enfants accueillis), indissociables pour beaucoup de toute notion de qualité, est abordée. Pas question de contrôle normé, mais notamment pour les EAJE « des modalités de suivi plus adaptées, d’auto-évaluations internes et de formations communes à tous les professionnels ». Le rapport souligne aussi que la notion de qualité d’accueil ne peut s’émanciper des normes liées aux taux d’encadrement et à la qualification des professionnels en charge des jeunes enfants.

Avec quels moyens ?
Pour les assistantes maternelles et les gardes d’enfants à domicile, le rapport met en avant le renforcement des missions des RAM dont le rôle central est rappelé. Un socle minimal de temps de regroupement et de réflexion sur la pratique dans les RAM étant préconisé .A charge pour les parents-employeurs de prévoir des aménagements pour libérer du temps à leur assistante maternelle. Par ailleurs désormais l'affiliation à un RAM serait obligatoire pour tous les professionnels de l'accueil individuel ( mais affiliation ne veut pas dire fréquentation ...).

Trame pour la formation continue des 600 000 professionnels de la petite enfance
Enfin rappelons que ce rapport et ses repères de qualité devrait nourrir le contenu des formations prévues dans le cadre de la formation continue commune aux 600 000 professionnels de petite enfance annoncé dans le cadre de la Stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale annoncée par le président de la République à l’automne dernier. C'est d'ailleurs ce qu'ont souligné les deux secrétaires d'Etat en notant que « ce rapport fait sens au cœur de la stratégie de lutte contre la pauvreté, avec en vue la formation de 600.000 professionnels de la petite enfance d’ici à 2022.» Christelle Dubos a salué la qualité de ce rapport « très attendu qui nous servira donc de référentiel pédagogique de la petite enfance ». Adrien Taquet quant à lui a insisté « sur la richesse des travaux et l’exhaustivité de ce rapport  ( …) »  et précisé que  que « l’accueil de la petite enfance est un rouage central de notre politique de lutte contre les inégalités de destin. »

Reste à savoir, outre s'en inspirer pour son vaste programme de formation continue, ce que le  gouvernement fera de ce rapport de plus de 200 pages, fourni et étayé comme le sont en général les rapports du HCFEA. Comment ces repères et ces propositions pourront se conjuguer avec les futures ordonnances réformant les modes d’accueil, avec les propositions du rapport Peyron sur la PMI ? Et surtout, comme le soulignait récemment Élisabeth Laithier, co-présidente du groupe petite enfance de l’AMF, quels moyens seront donnés pour la mise en œuvre de ce pilotage national de la qualité des modes d'accueil du jeune enfant, ambitieux et séduisant à bien des égards ? Si ces préconisations étaient retenues,  cela pourrait -il être de nature à rassurer les professionnels du secteur qui trouveraient réponse à certaines de leurs interrogations ou inquiétudes (voir notamment les revendications de Pas de bébés à la consigne ou de la pétition des salariés de Babilou) ou à susciter de nouvelles vocations. Pas sûr.


Voir le détail des  24 repères
Télécharger le rapport
Article rédigé par : C.L
Publié le 25 avril 2019
Mis à jour le 01 mai 2019