De l’accueil d’urgence au répit, Dépann’ familles répond aux besoins de garde complexes
Un service handicap pour répondre à un besoin de répit
En 2001, l’association est sollicitée par des parents d’enfants en situation de handicap. « Pour répondre à leur demande, nous avons constitué une équipe d’éducateurs spécialisés pour intervenir à domicile. A ce moment-là, se souvient Henriette Nallet, la directrice était une éducatrice spécialisée qui venait d’un service de psychiatrie, elle avait donc un réseau très actif dans le domaine de l’autisme. L’association en a toujours gardé un attachement particulier à l’accompagnement de ces familles. » Avec le service handicap, les motifs d’intervention de Dépann’ familles se sont donc un peu élargis. L’association intervient pour des enfants et jeunes gens de 3 à 20 ans, qui ont une reconnaissance de handicap. L’intervention se fait soit en pointillés dans la journée - ce qui permet aux parents de maintenir leur activité professionnelle sans s’interrompre pour un rendez-vous d’orthophoniste - ou bien de commencer tôt un jour de la semaine alors que ce n’est pas compatible avec les horaires de l’enfant. « On peut aussi intervenir une demi-journée par semaine de façon régulière pour permettre au parent qui s’occupe de l’enfant d’aller faire les courses, de prendre du repos, ou de faire une activité avec un autre enfant… » précise Henriette Nallet. Un temps de répit, essentiel pour ces parents, mais également un accompagnement éducatif et du soutien à la famille (AESF) car « dans de nombreuses situations, les enfants n’ont pas de prise en charge, ou extrêmement faible », constate la directrice. Cette notion de répit s’est bien démocratisée depuis quelques années « et depuis que la CAF a ajouté l’aide au répit dans ses motifs, fait remarquer Henriette Nallet. Maintenant nous ne sommes plus les seuls sur ce créneau ! » Et de citer l’association Bulle d’air de la MSA, et une plateforme Autisme Répit 38 portée par l’AFIPH.
De l’accueil d’urgence aux horaires atypiques
En 2011, Dépann’ familles participe à un appel à projet national dans le cadre d’Espoir Banlieues et signe une convention avec la CAF pour répondre aux besoins d’accueil en horaires atypiques. Les intervenantes ont désormais la possibilité d’intervenir tôt le matin et tard le soir pour permettre une réponse à l’urgence, la reprise ou le maintien d’une activité professionnelle, du travail en horaires atypiques, du répit, de l’accompagnement éducatif, en complément d’un mode d’accueil existant, avec un volume d’heures plus conséquent (jusqu’à 80h).
Des intervenantes formées aux spécificités de l’accueil d’urgence
Les professionnelles qui interviennent à domicile sont diplômées, le plus souvent d’un CAP AEPE ou dotées d’une expérience significative en tant qu’assistante maternelle. Elles bénéficient surtout d’un accompagnement et d’un suivi spécifiques par trois réunions d’équipe par mois avec analyse de pratique, et cela depuis l’origine, bien avant l’obligation légale de le faire. « Cela permet d’être vraiment dans une posture de professionnalisation et d’accompagnement de l’équipe », précise la directrice. C’est également une façon de mieux prendre en compte la difficulté de leurs interventions. « Lorsqu’elles travaillent en horaires atypiques, elles peuvent arriver à 6h30 chez une famille qu’elles n’ont pas rencontrée avant. En général, il n’y a eu qu’un échange téléphonique avec la responsable du service qui a essayé d’amener la famille à se préparer, et lui a expliqué comment en parler à son enfant. Elles vont se retrouver à réveiller un enfant qu’elles n’ont jamais vu, décrit-elle. A lui donner son petit déjeuner dans une maison qu’elles ne connaissent pas, à l’accompagner à l’école avec parfois un enfant qui refuse ; dans des situations très interculturelles, avec parfois même des aliments qu’elles ne connaissent pas ! » Toutes sont formées et accompagnées pour être capables de gérer ces situations délicates et l’analyse de la pratique leur permet de mettre en commun ces situations pour voir comment mieux y répondre.
Une crèche AVIP, en accueil d’urgence et horaires atypiques
En 2022, Dépann’ familles s’installe à Fontaine dans de nouveaux locaux en banlieue de Grenoble et ouvre Les Ecrins, une micro-crèche fidèle au projet d’accueil de l’association. La structure propose 6 places pour répondre à des besoins urgents ou de dépannage, accueille les enfants en situation de handicap et propose 6 places AVIP. « Il faut garder en tête que toute l’activité de Dépann’ familles reste du dépannage et que l’on va orienter la famille vers une solution plus pérenne et de droit courant. On ne veut pas être un mode de garde pérenne », souligne Henriette Nallet. Ce sont donc des contrats de 3 mois, dont le renouvellement est soumis à condition.
Recrutement et temps de travail, des problématiques délicates
Avec un mode de fonctionnement aussi adaptable, des horaires aussi atypiques, la gestion du personnel est une problématique complexe pour Dépann’ familles qui embauche 6 professionnels à la crèche ; 10 éducateurs (10 à 20 h par semaine) pour le service handicap ; 5 professionnels (maximum 20 heures par semaine) pour le service petite enfance « et c’est largement insuffisant, nous avons beaucoup de mal à recruter », déplore Henriette Nallet. Les temps d’activité sont plus souvent le matin et le soir, peu en journée. Quelques partenariats ont donc été tissés avec des crèches pour des remplacements en journée. « A un moment donné, explique Henriette Nallet, l’association s’est rendu compte qu’elle précarisait elle-même son personnel. C’est ce qui a contribué à l’idée de la création de la crèche (…) Aujourd’hui, la moitié de l’équipe travaille à domicile, l’autre moitié s’équilibre à son rythme entre la crèche et l’accueil à domicile. »
Main dans la main avec les communes
Malgré plus de trente ans d’existence, Dépann’ familles reste une structure fragile, mise à mal par les difficultés de recrutement. Selon la directrice, l’une des forces de l’association a été d’intégrer rapidement des conventions avec les communes afin de financer aux familles quelques heures d’accueil à des tarifs plus accessibles. De 20 heures, jusqu’à 400-500 heures prises en charge par les communes. Un réseau qu’il faudrait renforcer aujourd’hui, car « cela continue encore mais ça marche plus ou moins bien, remarque Henriette Nallet. Les autres financements se sont un peu empilés alors parfois on ne sait plus très bien quand on fait appel aux communes... » A Grenoble, où le CCAS porte la politique petite enfance, la Ville soutient et subventionne Dépann’ familles sans condition d'activité. Mais « le CCAS a voulu garder la main, explique Henriette Nallet, il porte un projet d'intervention en horaire atypique dans des familles précaires pour lequel Dépann' familles intervient en tant que prestataire». Mais aujourd’hui, si l’équipe administrative peine à maintenir un fragile équilibre budgétaire, Dépann’ familles ne manque ni de projets ni d’ambitions pour les familles les plus fragiles.
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