Théorie de l’attachement : qu'en sait-on aujourd'hui ?

La théorie de l’attachement, conceptualisée par Bowlby, a été amplement prouvée par ses successeurs. De Mary Ainsworth à Geneviève Appell, tour d’horizon de quelques recherches universitaires et applications des principes de l’attachement.
« On devrait en réalité parler des principes de l’attachement puisque la théorie de Bowlby a été scientifiquement prouvée » assure Yvane Wiart*. Cette psychologue spécialiste de l’attachement est formelle : depuis les années 50, les découvertes du psychiatre n’ont pas évolué mais ont été simplement confirmées.

Du paradigme de la situation étrange à la représentation de soi, d'autrui et du monde
Une collaboratrice de Bowlby, Mary Ainsworth, a ainsi étudié dans les années 60 le comportement d'enfants d’environ 12 mois lorsqu’ils retrouvaient leur mère après une courte séparation. « On appelle cela le paradigme de la situation étrange, précise Yvane Wiart. Les enfants, placés en condition de stress, réagissent de différentes manières au retour de leur parent. » Les travaux d'Ainsworth ont permis de vérifier expérimentalement les 3 grands types d’attachement repérés par Bowlby : « secure » lorsque l’enfant est heureux de retrouver sa mère, « anxieux » lorsqu’il pleure beaucoup en la voyant, « évitant » lorsqu’il ne réagit pas à son retour.
Dans les années 90, son élève Mary Main a étudié l'intériorisation des schémas d'attachement : le passage du comportemental aux représentations mentales liées à l’attachement. « Elle a élaboré des outils d'évaluation des représentations de soi, d'autrui et du monde, typiques de chaque style d'attachement » explique Yvane Wiart. Main a notamment mis au point l’Adult Attachment Interview, qui permet de faire émerger ces représentations chez l'adulte. Elle a ainsi pu vérifier qu’un individu demeurait « secure », « anxieux » ou « évitant » au cours de sa vie et qu'il tendait à reproduire ce style relationnel avec son enfant.

Étude en structures d’accueil pour enfant
Aux côtés de Mary Ainsworth et de Mary Main, de nombreux autres chercheurs se sont penchés sur l’attachement. Certains ont particulièrement étudié ses applications dans les établissements d’accueil pour jeunes enfants. Dans un orphelinat, Emmy Pickler a ainsi développé le principe de « référentes », c’est-à-dire qu’un même groupe d’adultes s’occupe systématiquement des mêmes enfants. L’objectif était d’accroître la confiance et le sentiment de sécurité. À sa suite, Myriam David et Geneviève Appell ont analysé les effets de la séparation parent-enfant afin d’améliorer notamment l’accueil en crèche. « Myriam David a notamment a été l’une des premières personnes à parler de l'attachement en France, précise Marie Noëlle de Theux-Heymans, psychologue formée en théorie de l’attachement. Elle a participé à l'ouverture de plusieurs institutions dans les années 70, centrées sur la relation parent-enfant, et elle a eu un rôle actif dans la formation des assistantes maternelles durant les années 80. » Toutes ces expérimentations servent aujourd’hui de socle aux établissements d’accueil de jeunes enfants pour favoriser un attachement plus « secure ».

* Auteur de « L'attachement, un instinct oublié » (2011, éd. Albin Michel)
Pour en savoir plus : https://www.cairn.info/revue-dialogue-2007-1-page-7.ht

 
Article rédigé par : Nelly Moussu
Publié le 29 mars 2016
Mis à jour le 12 novembre 2019